Égypte : Derrière les attentats contre les chrétiens la violence d'un régime impopulaire05/01/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/01/une-2214.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C240%2C324_crop_detail.png

Dans le monde

Égypte : Derrière les attentats contre les chrétiens la violence d'un régime impopulaire

Alors que le pouvoir égyptien dénonce « la main de l'étranger » derrière l'attentat du 31 décembre dans l'église chrétienne des Deux-Saints à Alexandrie, qui a tué vingt-trois personnes et en a blessé près de quatre-vingts autres, plusieurs ONG se réclamant de la défense des droits de l'homme se sont réunies au Caire pour dénoncer la responsabilité du gouvernement dans les violences à l'égard des coptes d'Égypte, qui représenteraient entre 6 et 10 % des quatre-vingts millions d'habitants.

Une nouvelle fois, des manifestations de colère ont rassemblé des milliers de coptes au lendemain de l'attentat, à Alexandrie et au Caire. Au Caire, plus d'un millier de manifestants, s'affrontant à la police, s'en sont pris à un membre du gouvernement et à un notable, l'imam de la mosquée Al Azhar. Des centaines de manifestants se sont également rassemblés devant le ministère des Affaires étrangères et la télévision d'État.

Pourtant toutes les autorités, le président Moubarak, les responsables religieux, comme l'opposition officiellement interdite mais tolérée des Frères musulmans, tous condamnent avec une belle unanimité l'attentat.

L'église où a eu lieu celui-ci figurait au demeurant sur une liste d'une cinquantaine de lieux de culte coptes, en Égypte et dans des pays voisins, désignés début décembre sur un site internet d'Al Qaïda. Tous les chrétiens d'Orient pourraient certes constituer une cible pour des groupes terroristes islamistes. Cependant d'autres agressions contre les coptes ont déjà eu lieu ces dernières années en Égypte, dont une début janvier 2010 en Haute-Égypte, ayant fait sept victimes.

Mais sans aller chercher plus loin, le pouvoir lui-même a une lourde responsabilité dans la situation des chrétiens d'Égypte. Discriminés dans les emplois des administrations, confrontés bien souvent à l'opprobre et à l'accusation de prosélytisme, les Égyptiens coptes sont aussi parfois harcelés dans leur vie quotidienne, comme l'ont montré les manifestations, en novembre dernier, à Giza, à l'ouest du Caire. Des bulldozers tout ce qu'il y a de plus officiels venus s'opposer à la construction d'une église chrétienne ont provoqué des réactions de colère de plusieurs milliers de manifestants, violemment réprimés par la police qui a causé la mort de deux coptes. Au moment même où se déroulaient des élections législatives totalement truquées par le parti de Moubarak, l'intervention de ces bulldozers ne venait-elle pas à point nommé détourner l'attention vers un sujet moins épineux pour le pouvoir ?

Le régime de Moubarak est discrédité et confronté à des difficultés croissantes. On a assisté à des grèves ouvrières massives dans le textile et de nombreux autres secteurs. Dans certaines professions comme celles des juges, des avocats, des infirmières, on assiste à des mouvements pour la création de syndicats indépendants de l'appareil d'État, Moubarak et sa clique ne sont certes pas les organisateurs de l'attentat du 31 décembre, encore qu'il ne soit pas sûr que certains de leurs services n'y aient pas trempé. En tout cas, il est certain qu'ils ne se sont pas privés de se servir du sentiment anticopte et de le développer, car jouer la carte des affrontements interreligieux fait partie de leur politique.

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