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- Lutte ouvrière n°2214
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Hongrie - Ce qui gêne (un peu) : Les grandes puissances
Ces jours-ci, la presse s'intéresse à la Hongrie parce que le gouvernement de l'ultra-conservateur Viktor Orban, qui a fait de la démagogie xénophobe son fonds de commerce, vient de promulguer une loi qui bâillonne les médias.
Pour cela, il a créé un organisme, lié de fait au parti au pouvoir, le Fidesz, chargé de veiller, sous peine de lourdes amendes, à ce que la presse soit « équilibrée ». En clair : à ce qu'elle ne s'en prenne pas aux autorités, ou alors à ses risques et périls. La preuve immédiate en a été assénée par le licenciement sur le champ d'un présentateur radio qui avait marqué d'une minute de silence l'entrée en vigueur de ladite loi.
Celle-ci s'appliquant à dater du 1er janvier, jour où, coïncidence due au fonctionnement de l'Union européenne (UE), la Hongrie en prenait la présidence pour six mois, l'affaire a eu une certaine résonnance.
Ce n'est là qu'un aspect, parmi d'autres, d'une évolution vers des régimes de plus en plus réactionnaires et autoritaires qui frappe la Hongrie comme toute l'Europe centrale. Il y a une vingtaine d'années, les pays que l'on disait de Démocratie populaire ont rejoint le giron de l'économie capitaliste. Une économie que les classes laborieuses de cette région de l'Europe subissent encore plus durement que leurs soeurs d'Europe de l'Ouest.
Les puissances impérialistes européennes - britannique, allemande et française, celle-ci traînant encore plus les pieds que les autres - ont fini par se décider à critiquer, timidement, Viktor Orban. Quant à la Commission européenne de Bruxelles, elle lui a demandé « d'expliquer » sa loi. Mais à côté de cette atteinte flagrante aux libertés, il y a toutes les autres attaques contre la population hongroise ou contre telle ou telle de ses composantes, qui laissent de marbre les milieux dirigeants européens.
Il y a la baisse draconienne de leur niveau de vie décidée par le gouvernement hongrois contre les salariés, les fonctionnaires, les chômeurs, les retraités, dans le cadre du plan du Fonds monétaire international et de l'UE, contrecoup de la crise de 2008 dans ce pays. Et puis, si les dirigeants d'Europe de l'Ouest invoquent les prétendues « valeurs européennes » à propos de la loi Orban sur la presse, on ne les a pas vus protester auprès du gouvernement hongrois quand celui-ci laisse son extrême droite libre d'appeler au lynchage des Roms, ni quand des ténors du parti du président Orban vomissent publiquement leur antisémitisme. Il est vrai que, concernant les Roms, Sarkozy serait assez mal placé.
Les autorités françaises, allemandes ou britanniques ont inspiré ou toléré dans leurs sphères d'influences respectives - en Afrique ou en ex-Yougoslavie, pour ne prendre que des exemples récents - tellement d'autres atteintes aux libertés et de politiques ignobles qu'elles seraient bien mal venues de faire la morale, même à un aussi sinistre politicien qu'Orban. Leur Europe, celle dont le gouvernement hongrois incarne la présidence pour six mois, est faite pour faciliter le commerce, la circulation des capitaux, l'accumulation des profits, pas pour imposer les libertés.