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France Télécom : La direction craint le changement de climat
Le 20 octobre, France Télécom a annoncé aux syndicats le gel jusqu'à la fin de l'année des restructurations alors que celles-ci s'enchaînaient jusqu'à présent les unes derrière les autres, accompagnées de mutations forcées et de diminutions d'effectifs. Mais simultanément, Stéphane Richard, actuel numéro 2 du groupe et pressenti comme futur PDG, a affirmé devant 150 cadres son intention de présenter d'ici la fin de l'année un plan qui inclura de nouvelles réorganisations assorties de mesures budgétaires.
France Télécom n'a donc pas renoncé à sa politique qui a procuré aux actionnaires 14,5 milliards de bénéfices en trois ans au prix de 22 000 suppressions d'emplois et de multiples pressions et flicages. Cependant, la direction a perdu un peu de son arrogance. Ce n'est pas à cause des suicides par eux-mêmes, ni même à cause de leur médiatisation, mais parce que, dans le prolongement de l'émotion suscitée par les gestes de désespoir, un ras-le-bol a commencé à s'exprimer, pour l'instant en ordre dispersé, dans des rassemblements locaux sur de nombreux sites France Télécom et dans quelques manifestations régionales. La direction sait que ce frémissement peut se transformer en colère et c'est cela qui la conduit à une certaine prudence.
Ceux qui travaillent dans les boutiques disposeront ainsi de quinze minutes le matin avant de recevoir le public. Sur les plateaux des centres d'appels en relation avec le public, les dix minutes dites « de vestiaire » sont désormais reconnues. En réalité, il s'agit du temps nécessaire pour lancer les applications techniques, autrement dit d'un temps de travail qui était jusqu'à présent décompté. Par exemple, pour répondre au téléphone entre 8 heures et 14 heures, il fallait arriver dix minutes plus tôt pour ne pas être en déficit d'heures en fin de mois !
France Télécom renonce donc à ce vol de temps de travail des salariés et annonce qu'une pause de dix minutes leur est accordée toutes les deux heures... en oubliant de préciser qu'il s'agit d'une mesure figurant déjà dans la convention collective des télécoms ! Cela ne fait d'ailleurs pas le compte car dans le passé, il y avait dix minutes de pause par heure (et non toutes les deux heures) dans les centres de renseignements téléphoniques destinés aux usagers : le « 12 » et les renseignements internationaux.
Et la direction ne renonce pas à faire pression sur les travailleurs pour qu'ils augmentent leur rendement. Ainsi, elle se refuse à remettre en cause les « performances individuelles comparées », se contentant d'annoncer la fin de leur affichage nominatif là où il existe. Le fait qu'elle annonce que pour les primes, elle tiendra davantage compte des résultats par équipe que des résultats individuels ne met pas fin à la concurrence introduite entre les travailleurs.
Pour ceux qui sont contrôlés sur le chiffre d'affaires qu'ils rapportent, la direction s'engage à diminuer la périodicité de leur évaluation, ce qui reste vague ; et dans les autres services l'évaluation d'un salarié ne pourra être réalisée plus d'une fois par semaine. De telles annonces sont révélatrices du flicage auquel sont soumis les travailleurs de France Télécom, une situation qui n'est d'ailleurs pas spécifique à cette entreprise. Cela fait partie de la guerre que le patronat mène contre les salariés, parallèlement à la réduction des effectifs.
Ce n'est pas parce que France Télécom avoue finalement les méthodes qu'elle avait mises en place pour augmenter son chiffre d'affaires et sa rentabilité financière qu'elle va les abandonner. Pour cela, il faudra qu'elle se heurte à la force organisée des 100 000 salariés qui y travaillent.