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- Lutte ouvrière n°2152
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Editorial
Des petites économies... et une économie qui tuent
L'information a pu passer inaperçue aux yeux de ceux qui sont en bonne santé, qui n'ont jamais eu d'accident ou une opération de l'appendicite. Le gouvernement se prépare à fermer les blocs opératoires qui font moins de 1 500 interventions par an. Cela conduirait à fermer 182 services chirurgicaux dans des hôpitaux de proximité, voire à la fermeture de ces hôpitaux.
Les propagandistes du gouvernement défilent à la télévision pour expliquer que ces fermetures, c'est bon pour la sécurité des malades, car les soins sont de meilleure qualité dans les grands hôpitaux. Les hypocrites ! Même s'il est évidemment préférable de faire faire les opérations très lourdes dans de grands hôpitaux, pour une multitude d'accidents quotidiens il vaut mieux un hôpital proche plutôt qu'un déplacement de 50 km, avec un temps de transport qui peut transformer un petit problème en grand.
Le gouvernement ferme ces services de proximité pour faire des économies, comme il fait fermer les unes après les autres les maternités de proximité. C'est pour la même raison qu'il vient d'annoncer le projet de ne rembourser qu'à 15 % toute une liste de médicaments. L'économie que cela ferait pour l'assurance-maladie est dérisoire, mais c'est autant de pris dans la poche de ceux qui ont besoin de ces médicaments, y compris les plus pauvres.
Le fil conducteur qui relie les attaques, qui sont toutes préjudiciables aux classes populaires, qui toutes aggravent leurs conditions d'existence, c'est de récupérer à leurs dépens les sommes fantastiques distribuées aux banquiers et aux grandes entreprises, c'est-à-dire à leurs actionnaires. Ces attaques ne visent pas seulement le service public de la santé, mais aussi tous les autres : l'enseignement public, la poste, les transports publics. Et ce n'est pas fini !
Toutes les classes populaires sont victimes de la dégradation des services publics, qui rendent de moins en moins de services et de plus en plus mal.
Mais ce sont les travailleurs salariés qui subissent déjà et qui subiront de plus en plus les coups que porteront conjointement le gouvernement et le grand patronat. C'est à eux qu'on présentera le gros de la note des sommes dépensées pour le système bancaire. Et c'est à eux aussi qu'on fera payer l'euphorie des banquiers et des actionnaires devant la nouvelle envolée de la Bourse et des profits bancaires.
C'est par la spéculation que les uns et les autres drainent vers eux-mêmes une part croissante de la richesse sociale. Mais cette richesse vient du travail, de l'exploitation. Et alimenter la machine à spéculer exige que soit aggravée toujours plus la pression sur les exploités, qu'on réduise la masse salariale en bloquant les salaires, en faisant faire plus de travail par moins de travailleurs, plus mal payés, en aggravant au passage le chômage.
Voilà ce que nous réserve la bourgeoisie. Ses choix ne résultent pas de l'étiquette politique du gouvernement : tous les gouvernements exécutent ce que le grand patronat et les banquiers exigent d'eux. Ils résultent de la crise elle-même, qui pousse la classe capitaliste dans une guerre à mort pour préserver ses profits. Préserver les profits, c'est écraser les salaires. Pour l'État, consacrer plus d'argent à la bourgeoisie, c'est en priver les services publics utiles à tous.
C'est pourquoi tous ceux qui cherchent une solution pour les travailleurs en prêchant la coopération entre travailleurs et capitalistes, au nom par exemple d'une autre politique industrielle, trompent les travailleurs et les désarment face à leurs ennemis.
Ce n'est pas avec le patronat et le gouvernement que les travailleurs préserveront leurs emplois et leurs salaires, c'est contre eux.
La crise est là pour tout le monde, répète-t-on. Mais les capitalistes ne sont menacés que dans leurs profits. Et encore pas vraiment, à en juger par la rapidité avec laquelle les plus grandes entreprises et les banques ont retrouvé leurs profits. Les travailleurs, eux, sont menacés dans leurs emplois et leurs salaires, la seule chose qu'ils ont pour vivre.
Nous ne pouvons pas les laisser faire ! Pour combattre le chômage, il faut imposer l'interdiction des licenciements et la répartition du travail entre tous sans diminution de salaire. Nous en avons collectivement les moyens : c'est nous qui faisons marcher toute l'économie et les machines à profits. Et nous en avons la force. C'est le patronat et le gouvernement qui finiront par nous obliger à nous en servir.
Arlette LAGUILLER
Éditorial des bulletins d'entreprise du 26 octobre