L’Europe de l’Est face aux migrants : surenchères xénophobes23/09/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/09/2460.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

L’Europe de l’Est face aux migrants : surenchères xénophobes

Après avoir élevé, à la hâte, un double mur de barbelés sur sa frontière avec la Serbie, la Hongrie va faire de même avec la Croatie et la Roumanie. Ces centaines de kilomètres de murs permettent au chef du gouvernement hongrois, Viktor Orban, de se poser en champion de la lutte contre l’afflux de migrants, qu’il dénonce comme des criminels, sinon comme des terroristes en puissance, qui menaceraient les racines chrétiennes de la société hongroise.

Et sur des foules d’hommes, de femmes, d’enfants ayant fui la guerre et la misère pour se frayer un passage vers l’Europe du Nord, où ils espèrent une vie meilleure, on a vu à la télévision les policiers d’Orban abattre leurs matraques à tour de bras. On vient aussi de les autoriser à tirer, mais avec des balles en caoutchouc, a fait savoir Budapest. Comme si de telles armes n’avaient pas déjà nombre de victimes à leur actif ! Les dirigeants allemands, français et anglais de l’Union européenne, dont ils vantent l’humanité, apprécieront en connaisseurs l’hypocrisie assassine de leur compère Orban.

Mais il n’est pas le seul de son espèce en Europe centrale. En matière de démagogie anti-émigrée, les autorités de Pologne, de Slovaquie et de la République tchèque ne sont pas en reste. Elles ont organisé ou encouragé des manifestations contre la proposition de Bruxelles d’admettre des quotas de réfugiés par pays. Et d’agiter devant leur opinion publique le chiffon rouge de la confession musulmane réelle ou supposée de nouveaux venus qu’elles disent ne pouvoir ni ne vouloir accueillir.

À la veille du sommet européen sur les migrants des 22 et 23 septembre, Bruxelles disait se féliciter que la Pologne et la République tchèque soient prêtes à plus de « flexibilité », que la Slovaquie ne s’oppose plus à accueillir des migrants, mais demande un délai, ou des aménagements comme la Hongrie. Finalement, lors du sommet, Hongrie, Slovaquie et République tchèque ont refusé toute forme de quotas contraignants.

Quoi qu’il en soit, dans ces pays, cet été a fourni une nouvelle occasion à des dirigeants, des partis politiques, de pousser les feux du nationalisme, de la xénophobie, pour conforter leur place au pouvoir ou y parvenir. Cette démagogie effrénée va coûter cher non seulement à ceux qui en sont la cible, les migrants, mais aussi aux populations locales.

La politique d’Orban et de ses pareils, quoi qu’ils prétendent, n’enraye pas l’afflux de migrants, on le constate. Et, bien sûr, ce n’est pas elle qui va éviter aux populations les problèmes que l’arrivée de gens démunis pose à des pays que la crise mondiale frappe durement et qui sont parmi les plus pauvres du continent. Ce repli nationaliste est non seulement loin de régler les problèmes qu’il invoque, mais il en suscite de nouveaux.

Au quotidien d’abord, il y a ceux qu’évoquait à la télévision le maire d’un bourg hongrois désormais coupé par un mur de ses voisins serbes et roumains. Jusqu’à récemment, on pouvait circuler entre eux sans entrave, et d’autant plus volontiers que, depuis des siècles, chacun y a des parents, des amis et qu’on y parle souvent la même langue. Et cette situation vaut pour toute cette partie de l’Europe.

Plus généralement, le poison de la haine de l’autre, que des démagogues y sèment, pousse ces pays et leurs habitants sur une voie de conflits interethniques, d’irrédentisme national, de guerres entre voisins. Les peuples d’Europe centrale ont payé ces horreurs de souffrances sans nom au cours de leur histoire. On l’a encore vu, il y a un quart de siècle, avec l’éclatement de la Yougoslavie. On le voit maintenant en Ukraine. Et demain, où ?

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