Réforme bancaire : La spéculation a encore de beaux jours devant elle19/12/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/12/une2316.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Réforme bancaire : La spéculation a encore de beaux jours devant elle

Pierre Moscovici présentait au Conseil des ministres du 19 décembre un projet de loi sur la réforme bancaire, censé, entre autres, limiter les pratiques spéculatives des banques. Mais les banquiers n'ont aucune raison de s'inquiéter : le projet préserve l'essentiel de leurs activités actuelles.

L'objectif de la loi serait de « séparer les activités utiles au financement de l'économie des activités spéculatives » : les banques devraient désormais se limiter « aux activités nécessaires au financement de l'économie ». Voilà qui est bien vague ! En pratique, le gouvernement ne demande pas la séparation entre banques de détail et banques d'affaires. Pourtant, leur regroupement a une part de responsabilité dans l'extension de la crise financière de 2008 à toute l'économie. Les banques pourront donc continuer à acheter des produits financiers avec l'argent des dépôts, tant qu'elles le font pour leurs clients et qu'elles adoptent « une gestion prudente des risques », formule qui n'engage à rien. Il ne devrait pas être difficile aux banques de prouver que bien des activités spéculatives font partie du « financement de l'économie » et sont faites pour leurs clients et non pour elles-mêmes.

En outre, même les activités classées comme spéculatives ne sont pas interdites aux banques. Elles devront seulement être regroupées dans une filiale spécifique. Les seules interdictions portent sur deux secteurs particulièrement risqués. Il s'agit de la spéculation sur les matières premières agricoles -- mais on ne sait pas selon quel critère acheter et vendre des matières premières agricoles relèvera du « financement de l'économie » ou de la spéculation -- et des opérations de trading « à haute fréquence », réalisées par ordinateur à grande vitesse, soit une toute petite part des opérations financières.

Selon le journal Les Échos, les grandes banques françaises ont calculé que le projet ne va regrouper dans la filiale spécifique que 2 % de leur activité, alors que leurs activités de marché pèsent 15 à 25 fois plus dans leur bilan. Autant dire que ce projet de loi ne va pas changer grand-chose au comportement des banquiers. Il est certes question de renforcer un peu les pouvoirs des autorités de surveillance, mais sans moyens humains supplémentaires, ce qui n'est donc rien d'autre qu'un voeu pieux.

Les banquiers ne s'y sont d'ailleurs pas trompés : la Fédération bancaire française a salué le maintien du « modèle français de banque universelle », c'est-à-dire de non-séparation entre les établissements chargés du dépôt et des crédits d'une part, et ceux chargés des interventions sur les marchés financiers d'autre part.

Une fois de plus, le gouvernement montre surtout qu'il ne veut exercer aucune contrainte sur les capitalistes et les spéculateurs.

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