La campagne des patrons du nettoyage : Quand le balai cache l'autolaveuse13/01/20122012Journal/medias/journalnumero/images/2012/01/une2267.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La campagne des patrons du nettoyage : Quand le balai cache l'autolaveuse

La Fédération des Entreprises de Propreté (FEP) s'est payé une page entière de publicité dans les principaux quotidiens nationaux pour expliquer que le « coût du travail » devenait insupportable.

La FEP affirme que les salaires constituent 80 % du prix du nettoyage, que la marge des entreprises est faible et que quatre cents d'entre elles ont déjà fermé, entraînant la suppression de 5 000 emplois. Le tout était illustré par le portrait d'un sympathique et suicidaire jeune homme occupé à se tirer une giclée de pistolet lave-vitre dans la tête. Mieux encore, la FEP tente de faire passer les employeurs du secteur pour les bienfaiteurs de leurs salariés, qui leur proposeraient CDI, formation, insertion, lutte contre l'illettrisme, etc.

La réalité est quelque peu différente. Les trois quarts des 430 000 travailleurs du nettoyage sont à temps partiel. Beaucoup travaillent « en décalé », avant l'ouverture des locaux où ils interviennent et après leur fermeture. Le tarif horaire minimum conventionnel, 2,5 % au-dessus du smic, est la règle et nombre de travailleurs sont obligés de travailler dans plusieurs sociétés différentes pour joindre les deux bouts.

De plus, la pression constante des donneurs d'ordres pour faire baisser le prix du nettoyage se traduit toujours par une hausse de la charge de travail de ceux qui manient le balai. La fédération patronale affirme avoir créé 100 000 emplois en dix ans, mais cela ne correspond qu'au passage généralisé du nettoyage à la sous-traitance, passage toujours accompagné d'une baisse des salaires et d'une aggravation des conditions de travail. Sur ces dix dernières années, le chiffre d'affaires du secteur a augmenté deux fois plus vite que le nombre des emplois, ce qui, pour des entreprises de main-d'oeuvre, indique une charge de travail individuelle plus lourde.

Rappelons aussi qu'il a fallu que des milliers de travailleurs sans papiers se mettent en mouvement, en particulier dans le nettoyage, pour que le patronat fasse mine de découvrir leur existence. Le caractère « social » de bien des patrons du nettoyage ne va pas jusqu'à reconnaître l'existence légale de certains de leurs salariés.

La campagne de la FEP essaie d'émouvoir sur leur sort afin de décrocher des lois qui favorisent les plus gros. Ainsi s'il y a bien 70 % des entreprises de nettoyage qui emploient moins de dix salariés, elles ne représentent que 10 % du chiffre d'affaires global. C'est, à peu de chose près, autant que la seule société ONET, employant 48 000 personnes en France, propriété de la famille Reinier à 75 %, et de la famille Peugeot pour le reste. Au total les sociétés employant plus de 500 personnes représentent la moitié du chiffre d'affaires global du nettoyage et ce sont elles qui emportent les marchés les plus rentables.

L'exonération de cotisations sociales patronales, c'est-à-dire d'une partie du salaire, est une fausse solution pour l'artisan, une ruine pour les caisses publiques, mais un pactole pour Reinier, Peugeot et leurs semblables.

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