Leur passé et le nôtre15/12/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/12/une1950.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Leur passé et le nôtre

Les politiciens, les journalistes et les historiens polémiquent sur le passé colonial de la France et la façon dont il faudrait le considérer aujourd'hui. Certains, à droite et à l'extrême droite, veulent l'exalter. D'autres, à gauche, le condamnent avec une mauvaise foi plus ou moins grande, selon qu'ils ont été plus ou moins souvent et plus ou moins longtemps aux affaires. Mais tous semblent dire que la politique coloniale a été celle de «la France» comme si, à cette époque lointaine et révolue, le pays tout entier avait soutenu ce qu'on appelait l'Empire Français, l'exploitation quotidienne des esclaves coloniaux et les massacres perpétrés régulièrement pour assurer la domination de la métropole sur ses territoires.

Pourtant, non seulement il y a toujours eu une résistance à la colonisation dans les pays qui en ont été victimes, mais il y a toujours eu aussi, malgré les mensonges répandus sur «l'oeuvre civilisatrices de la France», des femmes et des hommes opposés à cette politique dans la métropole même. En particulier le mouvement communiste a été, dès sa fondation, anticolonialiste et ne nourrissait aucune illusion sur les bienfaits que la colonisation aurait apportés aux peuples colonisés: «La construction des chemins de fer semble être une entreprise simple, naturelle, démocratique, culturelle, civilisatrice.... En réalité les liens capitalistes ont fait de cette construction un instrument d'oppression pour un milliard d'hommes» (Lénine, préface à l'Impérialisme, 1920).

Dans le Manifeste du premier congrès de l'Internationale Communiste, réuni à Moscou en 1919, on pouvait lire: «La dernière guerre, qui a été dans une large mesure une guerre pour la conquête des colonies, fut en même temps une guerre faite avec l'aide des colonies. Dans des proportions jusqu'alors inconnues, les peuples coloniaux ont été entraînés dans la guerre européenne. (...) Au nom de quoi? Au nom de leur droit à demeurer plus longtemps des esclaves de l'Angleterre et de la France.» Ce passage se terminait par l'appel suivant: «Esclaves coloniaux d'Afrique et d'Asie: l'heure de la dictature prolétarienne en Europe sonnera pour vous comme l'heure de votre délivrance.»

À cette époque, le mouvement communiste était fort du soutien de millions de prolétaires de par le monde et s'efforçait de créer des sections dans tous les pays colonisés. Les Partis Communistes des métropoles impérialistes, le parti français tout particulièrement, avaient obligation d'aider les militants des colonies par tous les moyens. Et c'est ce qu'ils firent, au moins au début des années 1920.

En 1938, dans le Programme de transition, Trotsky, alors seul véritable continuateur de la tradition communiste, écrivait: «Les problèmes centraux des pays coloniaux et semi-coloniaux sont: la révolution agraire (...) et l'indépendance nationale, c'est-à-dire le renversement du joug de l'impérialisme.» «La politique des Fronts Populaires et de "défense nationale" a comme une de ses tâches de faire avec les centaines de millions d'hommes de la population coloniale de la chair à canon pour l'impérialisme "démocratique". Le drapeau de la lutte émancipatrice des peuples coloniaux et semi-coloniaux, c'est-à-dire de plus de la moitié de l'humanité, passe définitivement aux mains de la IVeInternationale.»

Ces positions de principe, le mouvement communiste les avait illustrées de la manière la plus claire, la plus honnête et la plus frappante qui soit: une des premières mesures du pouvoir des Soviets, après la Révolution russe d'octobre 1917, fut l'émancipation sans condition de tous les peuples et nations opprimés de l'empire tsariste déchu.

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