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États-Unis : Crime d’État
Le gouverneur de la Californie, l'ancien acteur Arnold Schwarzenegger, a refusé la grâce de Stanley Williams, surnommé «Tookie», 51 ans, condamné à mort en 1981 pour quatre meurtres commis en 1979. Il a été exécuté mardi 13 décembre.
À l'époque des faits qui lui étaient reprochés, Stanley Williams était le chef d'un «gang» de jeunes Noirs, les «Crips», qu'il avait créé quand il avait 17 ans. S'il ne niait pas ce passé, il rejetait les quatre accusations de meurtre. Il se disait victime d'un procès raciste, puisqu'il avait été jugé par un jury composé uniquement de Blancs. Il estimait ne pas avoir à demander pardon pour des crimes qui lui étaient imputés, selon lui, à tort.
Le gouverneur de Californie s'est servi de ce refus pour justifier sa décision, en l'accompagnant de considérations de caractère religieux. En réalité, affaibli ces derniers temps par le rejet de plusieurs initiatives soumises au vote des électeurs, Schwarzenegger a visiblement préféré ménager les préjugés réactionnaires de l'électorat républicain.
On ne sait pas si Williams était coupable ou innocent, mais en revanche on sait que dans le système judiciaire américain, pour peu qu'on n'ait pas les moyens de payer pour faire effectuer une contre-enquête contradictoire, on peut très bien se retrouver inculpé pour un crime qu'on n'a pas commis. Les erreurs judiciaires y sont nombreuses. Et quand on est Noir, on a trois fois plus de possibilités d'être reconnu coupable, puisque le nombre des Noirs exécutés aux États-Unis, depuis le rétablissement de la peine de mort dans 38 États américains, représente 34% des condamnés, alors qu'ils ne sont que 12% de la population américaine.
Quoi qu'il en soit, l'homme qui vient d'être exécuté n'était plus celui qu'il avait pu être dans les années soixante-dix. En prison, il avait pris conscience de l'impasse où il s'était trouvé. Il s'adressait dans des livres, mais aussi dans des émissions de radio ou de télévision, aux adolescents tentés par la criminalité, pour essayer de les en dissuader. Un téléfilm avait raconté son histoire. Il était soutenu par Amnesty International, des organisations politiques et religieuses, et des groupes militant pour l'abrogation de la peine de mort, ainsi que par des personnalités politiques comme Jesse Jackson, Angela Davis ou la chanteuse Joan Baez. La journaliste qui l'avait aidé à écrire un livre s'est juré de reprendre l'enquête et de chercher les preuves de son innocence et de prouver ainsi que «le gouverneur Schwarzenegger est un meurtrier de sang-froid».
Depuis 1976, il y a eu 1002 exécutions capitales aux États-Unis, dont 59 rien que cette année. Et plus de trois mille condamnés à mort attendent dans les prisons que la sentence soit un jour exécutée.
Ce sinistre palmarès place les États-Unis en tête des pays développés qui n'ont pas encore aboli la peine de mort. C'est d'autant plus indigne que, par ailleurs, les dirigeants du pays ont la prétention de donner des leçons de comportement au monde entier, y compris par la force des armes. Mais chez eux ils n'ont toujours pas aboli cette pratique héritée des temps barbares de la loi du talion.