Une loi qui veut réhabiliter le temps des colonies15/12/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/12/une1950.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Une loi qui veut réhabiliter le temps des colonies

L'article 4 de la loi de février 2005, qui stipule que «les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord», continue de faire des vagues. Depuis la pétition de protestation initiée par un certain nombre d'historiens et d'enseignants, le Parti Socialiste, dont les députés n'ont pas sourcillé lors du vote de la loi, s'est réveillé pour demander l'abrogation de cet article4, demande repoussée par les députés UMP fin novembre. Et dernièrement, même Chirac et Villepin se sont crus obligés de le condamner à mots couverts.

Mais, dans la loi du 25février 2005, l'article incriminé n'est pas le seul à réhabiliter le «temps de la coloniale».

Le premier article parle de la nécessité d'exprimer une «reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l'oeuvre accomplie par la France» dans les colonies. Il faudrait donc rendre hommage à tous ceux qui ont participé à «l'oeuvre» colonisatrice. On retrouve bien là le même esprit que celui qui a guidé la rédaction de l'article4, plus «médiatisé».

Il faut aussi, stipule cet article1, reconnaître «les souffrances éprouvées et les sacrifices endurés par les rapatriés, les anciens membres des formations supplétives et militaires ». Mais en ce qui concerne les rapatriés, il faut souligner qu'il n'est pas question de reconnaître la responsabilité écrasante de l'État français et de sa politique coloniale dans les «souffrances» du million de pieds-noirs d'origine européenne et de Juifs algériens, qui servirent d'alibi à la répression contre les Algériens en lutte pour leur indépendance: il fallait alors maintenir la présence française soi-disant pour sauvegarder leurs intérêts. Mais c'est la politique de l'État français et de ses supplétifs d'extrême droite qui les mit en situation de n'avoir comme choix que «la valise ou le cercueil».

Mais, quoi qu'il en soit, il est pour le moins douteux de reconnaître les souffrances endurées par les rapatriés ou les harkis, utilisés dans les tâches de répression par l'armée française durant la guerre d'Algérie, ou encore par les «membres de formations militaires», sans avoir un mot pour celles, bien plus grandes, endurées par des centaines de milliers d'Algériens.

Le dernier article est de la même eau. «Peuvent demander le bénéfice d'une indemnisation forfaitaire les personnes de nationalité française (...) ayant fait l'objet, en relation directe avec les événements d'Algérie pendant la période du 31 octobre 1954 au 3 juillet 1962, de condamnations ou de sanctions amnistiées.», peut-on lire. En clair, cela permet d'indemniser par exemple d'anciens membres de l'OAS, l'Organisation Armée Secrète, organisation d'extrême droite qui regroupa les partisans de l'Algérie française et lança une vague d'attentats meurtriers. Parmi eux, on trouvait notamment des officiers qui avaient tué, pillé, torturé. À l'exception de quatre d'entre eux, les membres de l'OAS, les généraux et les colonels putchistes échappèrent au peloton, furent libérés en 1968, et leurs droits furent rétablis en 1982 par... Mitterrand. La loi du 25 février 2005 vient donc «compléter» en quelque sorte celle de 1982, pour ceux qui avaient été condamnés avant l'indépendance de l'Algérie!

Quelque temps après le vote, il y a eu un député socialiste de l'Hérault, Kléber Mesquida, pour s'insurger contre ceux qui considèrent que le «législateur ait été guidé par un esprit colonialiste». À se demander s'il sait lire.

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