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Grèce : Un plan qui sauve d'abord les banques
Après des négociations « dans la douleur », la Grèce aurait fait l'objet le 21 février d'un « sauvetage historique ». La douleur en question aurait été celle des négociateurs, qui ont mis une nuit à accoucher d'un accord. Mais non seulement cet accord repose sur la mise en place de mesures réduisant les Grecs à ce qu'on peut à peine appeler un régime de survie, mais son seul objectif est de renflouer les banquiers grecs et internationaux.
L'aide publique décidée par les ministres de la zone euro se montera à 130 milliards d'euros. Cette « aide » sera versée par étapes jusqu'en 2014, sous contrôle étroit de la Troïka (Union européenne, Banque européenne et FMI). Or le précédent plan de mai 2010, qui s'est terminé seulement fin 2011, a valu aux Grecs une nouvelle salve de mesures d'austérité en plein milieu de sa réalisation, le plan initial ayant été considéré comme mal appliqué ou insuffisant.
En ce qui concerne les créanciers privés (banques, sociétés d'assurance, fonds d'investissement), ils devraient effacer 107 milliards d'euros de la dette grecque, en échangeant leurs créances actuelles contre d'autres titres pour l'équivalent de 53,5 % de leur valeur nominale.
Du côté « aide publique », on peut évidemment se demander à qui iront ces 130 milliards d'euros. 23 milliards serviront à recapitaliser les banques grecques, 30 milliards seront une compensation versée aux banquiers créanciers apportant leurs titres à l'échange et 35 autres milliards devraient permettre à l'État de racheter une partie de sa dette. « L'aide publique » va donc être aspirée par le système financier et par l'État pour lui permettre de rembourser des titres venant sous peu à échéance.
Du côté des créanciers privés, la situation est plus qu'opaque. Toutes les grandes banques, allemandes et françaises en particulier, possèdent des titres grecs mais s'en sont déjà débarrassées en partie. Elles disent d'ailleurs qu'elles ont pris leurs précautions pour que l'échange des titres à 53 % de leur valeur n'affecte qu'assez peu leurs bénéfices. Ce n'est pas un hasard si le « négociateur en chef du secteur privé », selon les termes de l'Agence France Presse, était un certain Jean Lemierre de la BNP Paribas, une banque qui, avec six milliards de bénéfices, vient d'annoncer un résultat meilleur que prévu.
Et puis, l'échange de titres pourris contre d'autres supposés l'être un peu moins, c'est toujours cela de gagné. L'intérêt des banques n'est pas que la Grèce leur rembourse un capital, mais qu'elle paye des intérêts le plus longtemps possible et les plus élevés possible. Le « sacrifice » consenti par les financiers pour assainir la situation n'en est pas un.
En revanche, le dernier plan dont l'application sera suivie pas à pas par la Troïka, et qui était une condition pour l'approbation de « l'aide » de 130 milliards, étrangle littéralement la population grecque. Le salaire minimum doit être réduit à 600 euros brut, soit environ 480 euros net ; les fonctionnaires verront leur salaire baisser de 35 % et 15 000 postes devront être supprimés immédiatement. Les retraites dans les entreprises d'État devraient diminuer de 15 % et les indemnités de licenciement de 50 %.
Un chômage officiellement à plus de 20 %, et près de 50 % pour les jeunes en dessous de 24 ans, des prix en hausse qui ne permettent plus de se chauffer et même, pour certains, de se nourrir correctement ; un nombre croissant de sans-abri, de travailleurs réduits à la soupe populaire, des hôpitaux sans médicaments : voilà le prix auquel les Grecs payent le plan d'aide à la finance internationale.