- Accueil
- Lutte ouvrière n°2107
- Grèce : Après la grève générale du 10 décembre
Dans le monde
Grèce : Après la grève générale du 10 décembre
C'est dans le contexte de forte tension politique causée par l'assassinat par la police du jeune de quinze ans, Alexandros Grigoropoulos, que s'est déroulée le 10 décembre en Grèce la grève générale de protestation contre la vie chère, le chômage et les mesures du gouvernement prévues par la nouvelle loi de finances.
Le Premier ministre Caramanlis avait invité les syndicats à suspendre la grève, pour éviter que les manifestations n'offrent des occasions d'incidents. Mais le syndicat confédéral GSEE et celui de la fonction publique ADEDY ont confirmé la grève, tout en changeant le programme de la manifestation d'Athènes. Ils ont renoncé à défiler et se sont repliés sur un meeting sur la place Sintagma, devant le Parlement. Le syndicat PAME, lié au Parti Communiste, a manifesté de façon séparée sur la place Omonia.
La même matinée ont eu lieu deux autres manifestations, l'une de la coalition de gauche représentée au Parlement, SYRIZA, et une autre où se sont retrouvées l'ensemble des organisations d'extrême gauche. De ces deux manifestations sont partis des cortèges qui, après avoir défilé par les rues du centre, ont conflué sur la place où se trouvaient déjà le GSEE et l'ADEDY. Il y eut des minutes de tension, quand de nombreux jeunes sortis de la foule jetèrent sur la police des pierres et même quelques bouteilles incendiaires. La police répondit en tirant des grenades lacrymogènes, et la foule des manifestants se dispersa lentement, le meeting étant terminé.
Les manifestants ce jour-là ont été nombreux et le risque d'incidents ne les a pas découragés. La direction GSEE-ADEDY a déclaré que « la grève a paralysé le pays ». Au-delà de cette déclaration, il semble que la grève ait réussi en particulier dans les points forts des syndicats, les transports (même si, justement pour permettre aux travailleurs de manifester, le métro d'Athènes a fonctionné de 8 heures à 22 heures), les ports, les travailleurs des télécommunications et de la société d'électricité, les employés de banque, le personnel de l'enseignement et la fonction publique en général.
Le samedi 13 décembre après-midi et toute la nuit suivante, une foule de jeunes s'est rassemblée devant le Parlement pour une veillée en souvenir de leur camarade, tandis que la semaine suivante d'autres manifestations ont eu lieu à l'appel des syndicats.
Ainsi, le 16 décembre, mille travailleurs employés à la construction du nouveau stade de Votanikos et des zones adjacentes ont manifesté dans le centre d'Athènes, car il est possible que ces travaux soient suspendus et, pour 700 de ces travailleurs du bâtiment, c'est la perspective du licenciement qui s'ouvre. Puis le 17 décembre, c'est le PAME qui a appelé les travailleurs à la lutte contre « la politique qui soutient les intérêts et les profits du capital ». Jeudi 18 décembre, une grève de trois heures était prévue dans la fonction publique à l'appel de l'ADEDY sur la question des coupes budgétaires. Enfin le 19, c'étaient le GSEE et l'ADEDY qui appelaient les travailleurs devant le Parlement, où devait commencer le débat sur la loi de finances dont le vote était prévu dimanche 21. À l'exception de celle du jeudi, aucune de ces manifestations n'était associée directement à une grève qui aurait facilité la participation ouvrière à la protestation et pu toucher l'adversaire au point sensible de la production.
Cependant à Athènes, à Salonique et dans d'autres villes les protestations ont continué de la part d'importants groupes de jeunes, contre l'assassinat barbare du jeune Alexandros. Les universités et de nombreux lycées sont toujours occupés. À Athènes, des manifestations de lycéens ont eu lieu en même temps dans plusieurs quartiers. La population, les retraités, les travailleurs sympathisent en général avec ces initiatives. On a pu voir à la télévision quelques personnes, pas des plus jeunes, arracher un jeune homme des mains de la police qui tentait de l'arrêter.
Selon la télévision, la police aurait lancé au total durant ces journées cinq tonnes de grenades lacrymogènes et, ayant pratiquement épuisé ses stocks, aurait dû se réapprovisionner d'urgence auprès d'Israël. Mais après encore des heurts très violents, les incidents diminuent désormais et ne seraient plus le fait que des partisans du mouvement dit « antipouvoir ». En revanche, chaque jour Athènes et Salonique continuent à connaître des manifestations plus ou moins importantes.