Une seule façon de vaincre : S'y mettre tous ensemble!23/11/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/11/une1947.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Une seule façon de vaincre : S'y mettre tous ensemble!

Un signe ne trompait pas ce week-end, juste avant le démarrage de la grève des cheminots: le début de panique des représentants du gouvernement et du patronat. Leur inquiétude? La contagion! Du côté de Marseille, notables, ministres et médias auraient bien voulu annoncer la fin de la grève des traminots avant que les cheminots ne s'y mettent. Leur trouille? Que les grèves se propagent dans tous le pays, comme la révolte des jeunes des banlieues s'est propagée d'une ville à l'autre. Car la contagion des grèves, ce serait bien plus explosif que les voitures brûlées.

Les cheminots ont donc relancé le bal lundi soir avec leur grève reconductible. Ils seront suivis mercredi en région parisienne par les agents de la RATP, et jeudi, par les enseignants.

Reste à savoir si ces différents mouvements resteront cantonnés à leur secteur, chacun bien délimité et s'épuisant de lui-même, ou s'ils vont converger et se propager aux autres salariés. Car nous avons tous les mêmes raisons de nous battre. Et les mêmes revendications fondamentales. Contre le chômage, l'interdiction des licenciements et des contrats précaires. Pour retrouver notre pouvoir d'achat d'il y a 20 ans, l'augmentation de 300 euros par mois pour tous. Pour la santé, l'éducation, les transports et les logements décents, la création de centaines de milliers d'emplois dans les services publics.

Imposer ces quelques revendications devient une question de plus en plus urgente, presque un minimum face à la crise sociale. Mais comment faire, alors que, ces dernières années, de nombreux mouvements de grève, même durs, même longs, se sont soldés par des défaites?

Pour l'instant, la guerre sociale n'est menée en rangs serrés que par nos adversaires. Avec cynisme, comme à l'entraînement: leur état-major -le gouvernement- a mis au point un véritable plan de bataille contre le monde du travail. C'est de cette manière qu'il réussit pour l'instant à tout nettoyer au karcher, pas seulement les jeunes des banlieues, mais aussi le code du travail, les services publics, et notre fiche de paye.

En 2003, contre les enseignants en grève, le gouvernement passe en force: c'est la réforme des retraites. Aux marins mutins de la SNCM, il répond par le GIGN puis il privatise. Quant aux traminots, après 43 jours d'un conflit bien suivi, ils n'ont (toujours) pas obtenu satisfaction sur leur principale revendication.

Mais est-ce si surprenant? Ces hommes qui nous dirigent ne connaissent qu'un seul langage: le rapport de force. Le dialogue, la négociation? Ils ne les utilisent que comme des ruses de guerre. Quant aux combats isolés, ils s'en accommodent et préfèrent les laisser s'essouffler. Parce que céder aux uns prouverait à d'autres que seule la lutte paie. Et s'il y a bien une chose qu'ils redoutent, c'est un mouvement qui menace de s'étendre.

Ce qui nous manque, à nous les travailleurs, c'est donc un plan de mobilisation qui nous permette d'aller vers ce mouvement d'ensemble. Mais même après 3 ans d'un gouvernement de droite, ni la gauche ni les directions syndicales ne s'y attellent. Les uns sont obnubilés par les élections de 2007. Les autres ne pensent qu'à négocier, même ceux qui reconnaissent, comme Bernard Thibault, que "nous sommes confrontés à une crise sociale". Et dans tous les cas, ils laissent les grévistes se battre seuls, et donc se faire battre les uns après les autres.

Cette semaine sociale particulière est une occasion de construire une riposte d'ensemble du monde du travail, la seule efficace. Même si ça n'est pas au programme des directions syndicales. Il ne manque pas grand-chose pour que nous soyons les plus forts. Seulement la conviction que lorsque les grèves menacent de s'étendre, la peur change de camp. Or, faire converger nos luttes ne nous demanderait ni plus de combativité, ni plus de sacrifice. Mais d'avoir le souci, lors de chaque lutte, d'essayer d'en entraîner d'autres: d'autres ateliers, d'autres secteurs, d'autres professions. Car quelques grévistes déterminés peuvent, en s'adressant tout simplement à leurs camarades du bureau ou de l'usine la plus proche, transformer un combat isolé en mouvement d'ensemble. Alors, mais alors seulement, nous pourrons, comme en 1968, renouer avec les victoires du monde du travail.

Éditorial des bulletins L'Étincelle du lundi 21 novembre 2005, édités par la Fraction de Lutte Ouvrière.

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