C'est non sans fierté que la chaîne France 2 a annoncé qu'elle diffuserait, en direct s'il vous plaît, les cérémonies d'intronisation d'Albert II de Monaco. Deux heures de "Son Altesse Sérénissime", en abrégé SAS, monarque d'opérette d'une principauté de deux kilomètres carrés peuplée de 32000 habitants, dont moins du cinquième de "nationalité" monégasque, mais où travaillent près de 40000 salariés "immigrés". Les représentants d'une quinzaine d'États avaient fait le déplacement, dont l'envoyé du pape. Quant à Chirac, dans ce haut lieu d'affaires dont certaines douteuses, il avait délégué son ministre de la Justice.

Le lieu n'attire pas ce petit monde de privilégiés seulement par son climat et son paysage. La principauté abrite, en plus des commerces et des professions libérales, plus de 4500 sociétés qui y ont leur siège social, dont une cinquantaine d'établissements financiers, pour un chiffre d'affaires de 9,2 milliards d'euros, chiffre qui représente la bagatelle de 5000 euros annuels par mètre carré!

Il est vrai que la principauté, dans le cadre de son indépendance reconnue par l'ONU où elle siège, offre des régimes fiscaux et une législation encore plus favorables que ceux du territoire d'à côté, avec permis de travail monégasque obligatoire pour les salariés bas de gamme qui y travaillent et, en revanche, absence de tout contrat de travail.

Voilà qui explique que ce confetti d'État du Moyen Âge continue d'exister, bien protégé à l'ombre de la France qui y trouve son compte. Pour qui dispose d'une fortune confortable en France ou ailleurs, on a affaire à un de ces territoires "d'exception" disposant de tous les avantages, les gains faciles, sans contrôle et avec des salariés bien encadrés. Bref un vrai paradis pour ces gens-là.

Le nouveau SAS, Albert pour les intimes, déclare à qui veut l'entendre qu'il souhaite débarrasser Monaco de sa réputation sulfureuse de paradis fiscal et de plate-forme de blanchiment d'argent sale. "La continuité n'est pas l'immobilisme", affirme-t-il. Pour la continuité, il vient de nommer chef de son cabinet un dirigeant du groupe Lagardère Médias qui édite... Paris-Match, un des journaux faisant leurs choux gras des frasques de la famille princière monégasque, qui sait organiser sa publicité.

Comme le dit (presque) une publicité télévisée bien connue pour des confiseries au chocolat: "Grâce au rocher, les réceptions du prince sont toujours réussies"!