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Dans les entreprises
Renault : Un mécontentement croissant
Le but affiché était de réduire ses stocks de 100 000 véhicules à 70 000, objectif atteint et même dépassé selon elle. Mais par ailleurs la direction a annoncé que, malgré le contexte de crise, le groupe Renault a progressé en parts de marché en 2008.
Les affaires ne vont donc pas si mal pour Renault.
Il n'en va pas de même pour les travailleurs. Ainsi, à l'usine du Mans qui produit les trains avant et arrière de nombreux véhicules du groupe, les intérimaires ont été comme partout les premières victimes de cette politique de baisse de production. Dès la rentrée de septembre il n'en restait plus qu'une poignée, alors que la moyenne mensuelle des sept premiers mois de l'année était de plus de 250.
Puis les journées non travaillées ont commencé à s'accélérer à partir de fin octobre 2008. Ainsi, du 24 octobre au 5 janvier dernier, la production a été totalement arrêtée pendant six semaines. Le reste du temps, nous n'avons travaillé en moyenne que trois jours par semaine.
Dans certains secteurs, des travailleurs n'ont pratiquement pas repris le travail durant cette période : les chefs ayant fait leur tri entre les « bons » et les « mauvais », autrement dit entre non-grévistes et grévistes.
Pour janvier 2009 cela a été à nouveau, selon les secteurs, deux, trois, quatre, voire cinq jours non travaillés par semaine qui ont été programmés suite aux arrêts des usines de carrosserie-montage du groupe.
Ces jours ont d'abord été imputés sur les « compteurs de congés collectifs », c'est-à-dire les jours que les travailleurs avaient à leur crédit du fait de dépassements d'horaires précédents. Mais ces compteurs se sont vidés à la grande vitesse, surtout pour les plus jeunes n'ayant qu'autour de cinq ans d'ancienneté et qui représentent près de la moitié de l'effectif ouvrier. Dès lors, les journées non travaillées ont été comptabilisées en chômage partiel.
Ainsi, à partir de novembre 2008, plus de 300 travailleurs ont été concernés par le chômage partiel. En décembre, près de 700 l'ont été pour des durées allant de un à treize jours. En janvier, vu l'état des compteurs de congés collectifs et les journées non travaillées programmées, la quasi-totalité des 1 300 ouvriers de l'usine devraient l'être. Seule la fonderie est pour le moment épargnée.
Dans ces conditions, la perte de salaire tourne autour de 25 à 35 euros par jour de chômage selon le taux horaire. En décembre, la perte de salaire pour ceux qui ont le plus chômé tournait autour de 400 euros.
Mais malgré cette situation difficile, au niveau des travailleurs, ce n'est pas l'abattement ni la résignation qui dominent. Ainsi des petits débrayages ont eu lieu contre des sanctions ou des injustices criantes.
Il est évident qu'un certain nombre d'entre nous ont mis un frein à la production : inutile de battre des records, puisqu'on chôme à tire-larigot.
Du coup, dans les réunions avec le personnel, la direction essaie de resserrer les boulons en disant qu'il est impératif que la production prévue entre les journées non travaillées sorte. Mais de plus en plus de travailleurs envoient promener les chefs, en intervenant et en argumentant. Personne ne croit que Renault est en difficulté. Les réflexions contre les salaires de Ghosn, contre les actionnaires, fusent de plus en plus dans ces réunions.
Le fait qu'il y ait deux catégories, le personnel payé au forfait qui ne chôme pas et les autres qui perdent de l'argent, est perçu comme une injustice. Aussi des réactions collectives contre cette situation ont commencé.