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- Lutte ouvrière n°2113
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Lear - Lagny (Oise) : Menace de fermeture, usine arrêtée
Les trois cents ouvriers de l'usine de Lagny fournissent l'usine PSA d'Aulnay, où sont fabriquées les Citroën C2 et C3. En décembre dernier, ils avaient fait grève pour obtenir le paiement des jours de chômage technique - les différents sites étant directement affectés par les mises à l'arrêt des usines des grands groupes de l'automobile. Ils avaient gagné mais, pendant les congés de Noël, le patron avait pris sa petite revanche et tenté de « faire le ménage » parmi les travailleurs combatifs : sept salariés étaient licenciés - soi-disant pour avoir bloqué des camions - et neuf délégués mis à pied en attendant une décision de l'inspection du travail.
Et voilà que depuis des mois, dans l'usine, des rumeurs circulent sur une probable fermeture du site pour une délocalisation... dans un département voisin, à Cergy (Val-d'Oise), qui fournit aujourd'hui l'usine PSA de Poissy. Écoeurés de ne pas réussir à savoir quel allait réellement être leur sort, les travailleurs de Lagny ont décidé jeudi 22 janvier de ralentir la production, pour pousser le patron à dévoiler ses intentions.
Le lendemain, la direction annonçait que l'usine allait effectivement fermer, dès fin avril, et que les ouvriers auraient le choix entre suivre la production à Cergy, ou prendre la porte. Ce jour-là, aucune production n'est sortie des chaînes de Lear, les ouvriers passant la journée à discuter de la situation.
La direction a ensuite agi de telle manière qu'il devenait évident qu'elle avait préparé son coup de longue date - en accord avec la direction de PSA, naturellement. Pendant le week-end, elle a déménagé toutes les palettes servant à transporter les kits de sièges et les a fait emmener à Cergy. Sans ces palettes, les camions ne peuvent emmener les sièges de Lagny vers Aulnay. Le patron empêchait ainsi les ouvriers de bloquer l'approvisionnement vers PSA.
En même temps, il faisait démarrer une noria de camions pour aller chercher des sièges de C3... en Espagne, à l'usine Lear de Madrid. Cela faisait en fait des mois que la direction de Lear avait fait du stock de sièges à Madrid, en prévision de l'annonce de la fermeture de Lagny. Elle aurait aujourd'hui à disposition quelque 5 000 à 8 000 kits de sièges.
Résultat, l'usine d'Aulnay est aujourd'hui approvisionnée par Madrid, mais irrégulièrement : 1 400 voitures ont été produites et stockées sans sièges sur les parkings. Quant à Lagny, la production y est arrêtée de fait, puisque les palettes permettant de transporter les sièges ne sont plus là. Les ouvriers sont présents, mais ne travaillent pas.
Ils estiment que la direction devra verser à chacun au minimum 20 000 euros en plus des indemnités de licenciement. Et c'est bien le moins en effet : pour le patron, recentrer la production sur un seul site sera tout bénéfice.
Au lendemain des États généraux de l'automobile, on voit ce qu'il en est des belles paroles de l'État et des patrons. Ces derniers, groupes automobiles et sous-traitants, sont prêts à encaisser des milliards offerts par l'État ; mais ils continuent à jeter sur le carreau des centaines d'ouvriers, pour maintenir les bénéfices des actionnaires.