Guadeloupe : Une négociation animée28/01/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/01/une2113.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Guadeloupe : Une négociation animée

Pour les négociations, le collectif avait exigé de discuter avec tous ceux qui représentent tout ou partie du pouvoir politique et social en Guadeloupe  : l'État en la personne du préfet, les présidents des assemblées locales (Conseil régional et Conseil général), tous les parlementaires, le Medef, les patrons de l'hôtellerie, les petites entreprises.

Ces différentes parties voulaient au départ négocier par domaine de compétences. Le collectif a refusé net. Après deux ou trois jours de tergiversations, ces représentants du pouvoir et élus locaux ont dû finir par accepter face à l'ampleur de la mobilisation.

Le ton fut donné dès le démarrage de la deuxième négociation, lundi 26 janvier. Les grévistes arrivèrent largement deux heures après l'heure fixée et, quand cela fut soulevé, ils expliquèrent que la route avait été longue car les forces de gendarmerie les avait contrôlés à des kilomètres alors que les élus, les patrons et gens de la préfecture avaient pu venir sans aucune difficulté !

Dès le début de ce deuxième face-à-face entre les grévistes et le camp patrons-élus-préfet, les discussions continuèrent sur un problème de « méthode de discussion » ! Le préfet proposa une méthode en plusieurs points, dont le premier était que, dès que les négociations s'ouvriraient sur les revendications des grévistes, le collectif Lyannaj Kont pwofitation (LKP) suspendrait la grève !

Les représentants de LKP ont énergiquement rejeté cette proposition. Et Domota, de l'UGTG, et Nomertin, de la CGTG, décidèrent qu'il fallait commencer à discuter des revendications, et non bavarder sur la méthode de discussion. Ils accusèrent les patrons (soi-disant « socioprofessionnels » !) et le préfet de jouer le pourrissement du conflit afin de mieux réprimer. Le préfet s'indigna alors que les représentants des grévistes puissent penser une telle chose ! Ceux-ci lui demandèrent alors : « Pourquoi faites-vous venir depuis quelques jours des avions remplis de forces de répression supplémentaires ? » Silence du concerné !

Quand la discussion finit par commencer sur les revendications, Nomertin, secrétaire de la CGTG, affirma : « Nous voulons les 200 euros d'augmentation pour tous les travailleurs ; la grève continuera jusqu'à satisfaction de cette revendication ainsi que sur la fixation d'un smic local en fonction du coût réel de la vie en Guadeloupe où les prix sont plus élevés qu'en France ».

Les deux syndicalistes (UGTG et CGTG) firent à tour de rôle différentes interventions très fortes, applaudis par les centaines de grévistes massés à l'extérieur. Des haut-parleurs avaient en effet été placés dehors et des radios et télévisions montraient en direct les débats ; signalons que RFO annonça que le reportage était le fait de travailleurs (journalistes et techniciens) grévistes, qui avaient accepté de le faire pour permettre à tous de suivre en direct toutes les négociations.

Les représentants des travailleurs en grève rappelèrent comment l'État subventionne à tour de bras les patrons, ceux de France (« Des milliards pour Renault, pour les banques, pour EADS ») et comment ceux d'ici disent ne pas pouvoir accorder les 200 euros d'augmentation ! Un patron argumenta en disant : « Si on vous donne 200 euros ici, il y aura des effets de délocalisation vers la Guyane et la Martinique, où ne sera pas appliquée l'augmentation de 200 euros ». Nomertin lui répliqua : « Les travailleurs de Martinique et de Guyane vont réclamer eux aussi des augmentations de salaire, et aussi ceux de France qui entrent en grève le 29 janvier ».

D'une façon générale, les intervenants de Lyannaj kont pwofitatyon (LKP) fustigèrent, dénoncèrent les méthodes des patrons, leur façon d'engranger toutes sortes de subventions publiques, de s'enrichir sur le dos des travailleurs ici et d'aller ouvrir des entreprises dans les pays où les salaires sont plus bas, où la protection sociale est inexistante ou très faible, tels que Saint-Domingue, la Dominique et même Mayotte.

Fleming, du PCG, intervint pour dire : « Vous, les patrons, vous parlez des salaires comme d'une charge sociale. Les salaires représentent une partie du travail des salariés et ceux-ci réclament une meilleure répartition de la richesse, un peu moins pour vous, un peu plus pour les travailleurs. »

Il faut relever les arguties du président socialiste du Conseil régional pour dire que l'augmentation de salaire n'était pas la seule façon d'augmenter le pouvoir d'achat ; on pouvait aussi baisser des prix, notamment par la baisse des taxes diverses, de la TVA ou de l'octroi de mer (vieille taxe coloniale), se lançant dans toute une énumération de ces baisses de taxes d'État ou locales. À croire que les patrons lui avaient demandé de convaincre les travailleurs grévistes de ne pas revendiquer d'augmentation de salaire. Un rôle qui lui vaut de plus en plus le mépris des travailleurs en grève, qui le brocardent sur des airs de gwo-ka.

Les milliers de gens qui ont suivi ce « débat-négociation » ont été très satisfaits de voir ceux qui les représentent dénoncer avec vigueur et conviction les méfaits des patrons et du capitalisme, dénoncer des marges inexplicables sur les produits, bien au-delà des prétendus frais d'approche dû à notre éloignement de l'Europe. Ils étaient contents de voir dénoncer l'appétit de subventions et de défiscalisations de ces gens-là et leur refus de toute amélioration des salaires des travailleurs, dont un grand nombre vivent avec des emplois précaires, bien au-dessous du smic actuel, et souvent à la limite ou au-dessous du seuil de pauvreté. Les signes d'encouragement et d'adhésion se multiplient dans la population pauvre envers la grève !

L'attitude pleine de fermeté et de détermination des deux responsables de l'UGTG et de la CGTG exprimait la volonté de milliers de grévistes et de milliers de pauvres qui soutiennent la grève et qui veulent qu'elle tienne bon jusqu'à ce que ce patronat arrogant et méprisant cède sur les revendications de salaire, et que l'État cède sur le problème de l'augmentation du smic conformément au coût de la vie locale.

D'autres « négociations » étaient prévues, les jours suivants...

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