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Dans le monde
Naufrage du Costa Concordia : Les responsabilités de l'armateur
Dix jours après le naufrage du Costa Concordia, le bilan est désormais de quinze morts et d'au moins vingt disparus. Au-delà de la responsabilité du capitaine, celle de l'armateur est de plus en plus mise en cause, mais les organismes internationaux de croisiéristes ont eu le culot d'affirmer que « la sécurité est la première priorité de l'industrie de la croisière et que nos standards sont au plus haut niveau ».
Ce sont pourtant bien les armateurs qui insistent auprès de leurs capitaines pour qu'ils passent le plus près possible des rivages. Dans le cas de l'île du Giglio, il y a même une lettre de remerciement officielle pour « le magnifique spectacle offert » le 18 août dernier, alors que le Concordia avait suivi, à quelques mètres près, la même route que le 13 janvier, jour du naufrage. La consigne officielle écrite est que les navires Costa ne doivent pas approcher à moins de 500 mètres des côtes. La consigne orale est qu'il faut avoir « l'esprit croisière » et faire plaisir aux touristes comme aux spectateurs. Et pas seulement sur les croisières Costa : des fjords de Norvège à la croisière autour du fort Boyard, l'attraction est la même : voir les cailloux de près. Mais ce n'est pas la même chose avec une barque et avec un navire de 250 mètres de long, huit mètres de tirant d'eau, qui ne peut ni stopper ni virer rapidement une fois lancé. Une erreur du capitaine et c'est la catastrophe, comme on l'a vu.
En cas d'accident, les chaloupes de sauvetage sont certes en nombre suffisant, c'est bien le moins, mais que faire lorsqu'elles restent coincées, poulies et manilles bloquées faute d'entretien ? Il y a bien un membre d'équipage pour trois passagers, mais seulement cinquante marins pour 4 000 personnes. La majeure partie de l'équipage est en effet constituée de personnel hôtelier que, quels que soient son courage et sa bonne volonté, quelques simulations d'évacuation n'ont pas transformé en marins capables de mettre à l'eau une chaloupe et de la piloter.
Dans leur plan de sécurité, les armateurs disent tenir compte de la taille et de la difficulté d'évacuer des milliers de personnes en chaloupe. Les navires sont censés être eux-mêmes sécurisés et capables de rentrer au port avec leurs passagers en toutes circonstances. Du Titanic au Costa Concordia, on voit que cela n'est pas toujours le cas.
Or c'est bien la question de la taille, et donc du profit, qui est principalement en cause. Ainsi, alors que Venise a vu depuis mille ans et plus des centaines de milliers de navire entrer dans la lagune, aborder et décharger sur ses quais, l'Unesco vient de demander, à la lumière du naufrage du Concordia, que les grands navires de croisière n'y abordent plus. Les quelque trois cents mastodontes de la taille du Corsa Concordia qui abordent la ville chaque année mettent en effet en péril les bâtiments, ne serait-ce que par les remous et les courants qu'ils créent. Et que dire s'il y avait accident, collision ou choc brutal avec le quai ?
Mais visiblement, pour les armateurs, la préoccupation principale n'est pas la sécurité : ni celle des passagers et des équipages, ni celles des villes abordées.