Les remanie...menteurs17/11/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/11/une-2207.gif.445x577_q85_box-0%2C9%2C172%2C231_crop_detail.png

Editorial

Les remanie...menteurs

À part les ministres, les ministrables et leurs cliques, tout le monde se moquait bien du suspense haletant que les commentateurs essayaient d'entretenir autour du remaniement ministériel.

Cela tombe bien : rien ne change, pas même le Premier ministre. Le jeu des chaises musicales a fait changer de ministère ceux qui restent et en a éjecté les autres. La seule nouveauté est l'arrivée de Juppé au gouvernement, c'est pour dire ! Les ministres dits centristes et, à leur suite, les commentateurs parlent de virage à droite du gouvernement. Si Sarkozy avait choisi Borloo, les mêmes parleraient sans doute, sinon de virage « à gauche », du moins de virage « social ». Allez savoir qui est le plus ou le moins social des deux hommes, qui ont fait partie des mêmes gouvernements sous Chirac, puis sous Sarkozy, et ont participé à la même politique !

Ce qui est certain, c'est que la nouvelle équipe Sarkozy-Fillon mènera la même politique antiouvrière que l'ancienne équipe Sarkozy-Fillon. Ils le disent, ils le revendiquent.

Cette continuité dans la politique antiouvrière, ils ne l'assument pas seulement parce que ce sont des hommes de droite. Cela leur facilite simplement la tâche. Car leur mépris des travailleurs, leurs idées réactionnaires, leur conviction affichée que la valeur des hommes se mesure à leur place dans la hiérarchie sociale et que cette place-là se mesure à la quantité d'argent qu'ils ont dans leurs coffres-forts, sont partagés par tout leur électorat. Ils gouvernent pour les riches, mais ils l'affichent d'autant plus cyniquement qu'ils ont la même admiration béate pour l'argent et pour ceux qui le détiennent que l'électorat auquel ils s'adressent.

Le gouvernement Fillon 2 continuera à porter des coups aux conditions d'existence des salariés, des retraités, des chômeurs, surtout parce que tels sont les ordres de la classe capitaliste, le véritable maître de la société.

Même en dehors des périodes de crise, le patronat n'accorde aux salariés que le strict minimum qui leur permet de vivre et de reconstituer jour après jour leur force de travail. Mais, avec l'aggravation de la crise, l'exploitation s'aggravera toujours plus. Pour augmenter les dividendes des actionnaires malgré la crise et un marché poussif, les capitalistes n'ont jamais rien trouvé de mieux qu'aggraver l'exploitation, augmenter le rythme du travail, diminuer les effectifs, pour faire faire plus de travail par moins de travailleurs, rendre les emplois plus flexibles, bloquer voire réduire les salaires. Ce qu'ils appellent « améliorer la compétitivité » n'est rien d'autre que l'aggravation de l'exploitation.

C'est pour la même raison que la bourgeoisie exige de l'État de rogner sur toutes les dépenses utiles à la population. Elle veut pouvoir puiser toujours plus dans les caisses publiques, dans celle du budget de l'État comme dans celles des retraites ou de l'assurance maladie. Les ministres expliquent que la rigueur est indispensable pour rembourser les dettes de l'État. Mais ces dettes ont été faites pour sauver, il y a deux ans, les banquiers menacés de faillite ou les patrons de l'automobile menacés de mévente, et c'est aux retraités, aux assurés sociaux, aux handicapés qu'on fait payer le remboursement et les intérêts qui vont avec !

Voilà pourquoi, lorsque les dirigeants socialistes affirment que le changement viendra des élections de 2012 et de l'arrivée du Parti Socialiste à la tête de l'État, ils disent des contre-vérités. Une fois au gouvernement, ils seront confrontés aux mêmes exigences du grand patronat et ils n'auront pas le courage politique, ni même l'envie de l'affronter.

Face à la crise, tous les gouvernements d'Europe mènent une politique d'austérité, quelle que soit leur étiquette. Seuls changent les mots pour la justifier, et encore pas toujours. La continuation des attaques contre le monde du travail est une certitude. Car les capitalistes n'abandonnent pas de plein gré la moindre parcelle de leurs profits.

Nous aurons à nous défendre. Bien naïf celui qui croirait qu'il suffit d'élire un Dominique Strauss-Kahn ou une Martine Aubry à la place de Sarkozy. « Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes », dit L'Internationale. Nous le ferons avec nos propres armes, les grèves, les manifestations. Il faudra seulement que les grèves soient assez puissantes, assez amples, assez explosives pour que la bourgeoisie se sente menacée dans ses profits et dans ses propriétés.

Au cours des deux derniers mois, les travailleurs ont relevé la tête. Ils apprendront à porter des coups qui fassent plier la bourgeoisie.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 15 novembre

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