Industrie pharmaceutique : Un médicament qui tue mais qui rapportait gros...17/11/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/11/une-2207.gif.445x577_q85_box-0%2C9%2C172%2C231_crop_detail.png

Leur société

Industrie pharmaceutique : Un médicament qui tue mais qui rapportait gros...

Un médicament, Mediator, fait les gros titres pour avoir provoqué en trente années d'existence plus de cinq cents décès. Sa saga vient rappeler que les médicaments n'ont pas pour seule vertu de soigner.

C'est en 1976 que Mediator a été commercialisé comme antidiabétique par les laboratoires Servier, le deuxième laboratoire français. En fait, Mediator s'est rapidement révélé être un coupe-faim efficace, un allié des régimes amaigrissants. Il appartient en effet à une famille chimique connue pour cet effet anorexigène. Et sur sa lancée, en 1985, Servier a mis sur le marché un autre médicament appartenant à cette même famille, l'Isoméride, mais cette fois directement indiqué pour perdre du poids. Une pilule qui a connu un gros succès commercial.

Or en 1997, aux États-Unis, les médicaments anorexigènes de cette classe chimique ont été interdits, parce que responsables de très graves effets secondaires cardiaques. En France, Isoméride a donc été retiré de la vente, mais pas Mediator. Avec la bénédiction des autorités sanitaires, qui ont simplement limité son indication au « diabète avec surcharge pondérale », il a continué sa carrière. Mieux, il a pris le relais de l'Isoméride et a vu ses ventes grossir, puisqu'il était désormais encore plus largement prescrit comme coupe-faim.

Ainsi, pendant les années 2000, Servier a vendu chaque année plus de six millions de boîtes de Mediator ; à plus de cinq euros la boîte, ce fut un cadeau annuel de près de 32 millions d'euros, réglés à 65 % par la Sécurité sociale. Et cela bien que, en 1999, la Commission de transparence, celle qui préside aux décisions de remboursement des médicaments, ait déclaré que le service médical rendu du Mediator était insuffisant, ce qui lui sert habituellement à justifier les déremboursements.

Ensuite, pendant plus de dix ans, des études ont démontré la toxicité cardiaque du Mediator mais il est resté sur le marché jusqu'en novembre 2009, date à laquelle il fut enfin retiré de la vente. Récemment encore, en juin 2010, quand le docteur Irène Frachon, qui s'est battue pour faire reconnaître la toxicité du produit, a publié un livre intitulé Mediator : Combien de morts ? les laboratoires Servier ont entamé une procédure. Ils ont gagné et le livre est sorti sous le titre Mediator, sous-titre censuré.

Hormone de croissance, sang contaminé, Distilbène, Mediator... l'intérêt sanitaire ne pèse pas lourd face à l'intérêt tout court.

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