Infractions à la sécurité du travail : La tolérance zéro ne s'applique pas30/04/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2178.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Infractions à la sécurité du travail : La tolérance zéro ne s'applique pas

Selon une enquête de la revue Santé et Travail et de l'association d'inspecteurs du travail L 611-10, moins de la moitié des procès-verbaux dressés par l'Inspection du travail en matière de santé et de sécurité font l'objet de poursuites pénales.

En effet, alors que les maladies professionnelles et les accidents du travail augmentent, et que les entreprises traînent toujours les pieds pour appliquer la réglementation en matière d'hygiène et sécurité, les juges ne se montrent guère empressés à poursuivre les employeurs délinquants. Ainsi, sur les 29 000 procès-verbaux recensés entre 2004 et 2009, portant sur la sécurité, le travail illégal ou les heures supplémentaires dans les entreprises du privé, 60 % se seraient volatilisés.

Les auteurs de l'enquête notent que, même quand les tribunaux consentent à poursuivre un employeur, celui-ci est relaxé dans 25 % des cas. Les condamnations sont donc rares et les sanctions relativement minimes. Ainsi, alors que dans le droit commun celui qui met en danger la vie d'autrui s'expose à une amende de 15 000 euros et à un an de prison, dans une entreprise, l'employeur qui expose des travailleurs à un risque de mort ou de blessure n'encourt qu'une amende maximum de 3 750 euros par salarié exposé, et aucune peine de prison, sauf en cas de récidive.

Même en cas d'accident du travail ayant entraîné une mutilation, les juges peuvent décider de classer l'affaire. Ainsi, alors qu'un employé d'une entreprise spécialisée dans la maintenance de matériels frigorifiques avait eu une phalange sectionnée et que deux délits avaient été constatés par les inspecteurs du travail, le parquet s'est contenté de rappeler la loi à l'employeur !

Et la situation risque d'empirer. En effet chaque agent de l'Inspection du travail se voit désormais fixer des objectifs chiffrés de contrôles par sa hiérarchie. Or, comme le souligne Sylvie Catala, inspectrice du travail et membre fondateur de l'association L 611-10, « compte tenu du temps et de l'investissement nécessaires à l'établissement de procédures pénales, cette politique par le chiffre risque de conduire les agents de l'Inspection du travail à verbaliser encore moins, afin de tenir les objectifs quantitatifs ».

Le constat est donc accablant. Les patrons qui s'assoient sur la législation du travail et exposent la santé de leurs salariés n'ont pas grand-chose à craindre. En tout cas, pas de la justice.

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