Manifestations d'agriculteurs : Revenu en chute libre30/04/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2178.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Manifestations d'agriculteurs : Revenu en chute libre

Après leurs manifestations de l'automne dernier, au cours desquelles avait été fustigé « Sarko céréales killer », les céréaliers et autres producteurs de « grandes cultures » - betteraves et oléagineux, par exemple - sont revenus manifester à plusieurs milliers à Paris, le 27 avril, à l'appel des fédérations régionales des syndicats d'exploitants agricoles, les FRSEA.

Au volant de près de 1 300 tracteurs bien visibles dans l'Est parisien, les céréaliers entendaient dénoncer la baisse de leurs revenus et s'opposer à l'application de la « réforme Barnier » du printemps 2009 . L'ancien ministre de l'Agriculture de Sarkozy assumait de fait la paternité d'un « bilan de santé » du volet français de la PAC, la politique agricole commune de l'Union européenne, qui prévoyait, dès 2010, qu'une partie des aides européennes seraient redistribuées en faveur d'exploitants plus en difficulté, comme les éleveurs ou l'agriculture de montagne. La FNSEA, à l'échelle nationale, a prudemment évité d'appeler à la manifestation, puisqu'elle avait cosigné la réforme Barnier, recevant en retour des tombereaux de fumier devant le siège de son congrès.

Les producteurs de « grandes cultures » ne sont sans doute pas les plus mal lotis des 320 000 exploitants agricoles. Leurs revenus moyens, sur vingt ans, ont chuté de 3 %, alors que ceux des producteurs de lait ou des viticulteurs ont perdu 40 %, et ceux des producteurs de fruits 63 %. Mais plus dure est la chute après les années fastes de 1995 à 1997 où leurs revenus avaient doublé, et surtout 2007 où le prix du blé avait flambé et où les revenus des céréaliers avaient connu des sommets, au moment même où, dans les pays les plus pauvres, des émeutes de la faim traduisaient la colère de la population devant le renchérissement du pain. De plus, sur les 80 000 agriculteurs concernés, qui exploitent en moyenne 120 hectares en Ile-de-France ou Picardie, 35 000 autres, « mixtes« plus modestes, n'exploitent en Pays de Loire, Bretagne ou Auvergne que quelques dizaines d'hectares en céréales ou oléoprotéagineux, tout en élevant porcs ou volailles. Ces derniers, moins « aidés » que les plus gros, subissent d'autant plus la chute des cours du blé ou de l'orge.

On ne peut préjuger de l'effet produit par le porte-parole du gouvernement, l'inénarrable Frédéric Lefebvre, qui a jugé bon de rappeler aux agriculteurs manifestants et aux autres que Sarkozy « les aime » et que « l'amour, ça veut d'abord dire la vérité à ceux qu'on aime... ça veut dire que les systèmes tels qu'ils étaient construits dans le passé ne peuvent pas continuer, chacun le sait » - air connu entonné en chour par tous les ministres du même Sarkozy.

Mais les céréaliers, surtout les moins gros, touchés à la fois par le retour de bâton de la spéculation sur le blé, ou le maïs, et par l'augmentation des engrais, des pesticides et carburants aux mains des capitalistes de la chimie ou du pétrole, risquent fort de ne pas apprécier cet amour-là.

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