Livreurs à vélo : les autoentrepreneurs se rebiffent14/09/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/09/2511.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Livreurs à vélo : les autoentrepreneurs se rebiffent

Dimanche 11 septembre, de nombreux livreurs de repas à vélo, membres d’un collectif né sur Facebook, manifestaient à Paris pour protester contre la précarité de leur travail et réclamer des droits.

Des sociétés comme Foodora, Delivero, Tok Tok Tok leur imposent le statut d’autoentrepreneur et leur font miroiter des revenus élevés. Les manifestants dénonçaient le fait qu’ils avaient tous les inconvénients de l’emploi salarié sans en avoir aucune des garanties.

Comme le veut leur statut, ces livreurs sont considérés non comme des employés mais comme les clients des sociétés. Une application Internet les met en relation avec les acheteurs et les restaurateurs préparant les plats. Ils sont payés à chaque course, ce qui les pousse à en multiplier le nombre, quitte à prendre des risques. La société prélève sa part au passage. Ils n’ont pas d’assurance en cas d’accident, ni de congés payés. Le tarif de la course est déterminé par la société, et des manifestants expliquaient que leur revenu avait tendance à baisser au fur et à mesure qu’augmente le nombre de jeunes attirés par le travail de coursier.

En cas de faillite de la société, ils ne touchent pas le chômage. Cela est arrivé aux livreurs travaillant pour la plateforme Take Eat Easy qui a fermé le 26 juillet dernier. Ses 2 500 coursiers ont dû également faire une croix sur le paiement des courses effectuées en juillet. La faillite est d’autant plus facile que ces sociétés n’ont pas de salariés, mais juste des clients. Elles lèvent des fonds sur les marchés financiers, réalisent des profits grâce aux mollets de coursiers, puis leurs propriétaires peuvent baisser le rideau. C’est ce que, dans le capitalisme dit moderne, on appelle une start-up.

Uber, la plateforme qui concurrence les taxis, a été l’une des premières à appliquer ce système. Là aussi, autoentrepreneur rime avec surexploitation. Le secrétaire du syndicat UNSA du secteur, cité par le mensuel Alternatives Économiques, estime qu’une fois prélevés ses 20 % par Uber, et déduits l’amortissement ou la location du véhicule, le carburant, les frais d’entretien, les cotisations sociales et la comptabilité, le chauffeur n’atteignait même pas le niveau du smic mensuel en travaillant 70 heures par semaine.

En janvier dernier Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, se félicitait du succès de la formule. Il déclarait : « Des jeunes, souvent victimes de l’exclusion, choisissent l’entreprenariat individuel parce que, pour beaucoup de jeunes aujourd’hui, c’est plus facile de trouver un client que de trouver un employeur. » Créer son entreprise est donc la voie dans laquelle les agents de Pôle emploi sont sommés d’orienter les chômeurs. Les rapaces d’Uber et des sociétés de livraison de nourriture tirent profit de la situation, via leurs applications Internet, pour priver de tout droit les travailleurs qui les enrichissent.

Heureusement, comme l’ont montré les livreurs de repas et avant eux les chauffeurs d’Uber, Internet peut aussi servir à se regrouper, à s’organiser et à manifester pour se faire respecter.

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