Gouvernement : vers l’état d’urgence permanent ?27/01/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/01/2478.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Gouvernement : vers l’état d’urgence permanent ?

Mercredi 27 janvier, le gouvernement devait présenter sa loi prolongeant l’état d’urgence pour trois mois supplémentaires. Ce régime d’exception est en vigueur déjà depuis le 13 novembre et devait prendre fin le 26 février. Sa prolongation jusqu’à la fin mai devra être ratifiée par le Parlement, mais personne ne doute du résultat, la droite et le PS y étant largement favorables.

Ainsi, les mesures d’exception pourront être poursuivies. Tout l’arsenal accompagnant l’état d’urgence, perquisitions administratives, assignations à résidence, interdictions de manifester et de se réunir, sera à la disposition des forces policières et des préfets, sans contrôle ni justification.

Les forces de police ont procédé déjà depuis le 13 novembre à plus de 3 000 perquisitions, à près de 400 interpellations, ordonné 400 assignations à résidence. Le ministre de l’Intérieur a indiqué que plus de 470 infractions avaient été constatées, et plus de 500 armes saisies. Mais pendant l’année 2014, sans loi spéciale, la police avait saisi 5 800 armes.

La quasi-totalité des méfaits dépistés grâce à l’état d’urgence concernent le droit commun, le plus souvent des affaires de drogue ou des trafics d’armes. Seules cinq enquêtes pour associations de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ont été lancées. Une seule personne, en tout et pour tout, a été mise en examen.

Par contre les « bavures » ont été nombreuses. Pour preuve, plusieurs dizaines d’assignations à résidence ont été annulées par la justice. Et les témoignages ont fleuri relatant des perquisitions musclées.

Mais tout cela n’est pas le problème de Hollande. Il ne veut à aucun prix encourir l’accusation de laxisme de la part de la droite ou de l’extrême droite, et il veut montrer qu’il fait tout ce qu’il faut pour lutter contre le terrorisme. Son envie de complaire aux politiciens de droite – il a besoin d’eux pour sa réforme de la Constitution – se mêle à sa volonté de donner des gages aux forces de police. Tous demandent plus de latitude, plus de pouvoirs de répression, moins de garde-fous judiciaires, moins de contrôles. Hollande, avec cette extension de la loi d’urgence, les approuve.

La Ligue des droits de l’homme a demandé la fin de l’état d’urgence, au moins la suspension de certaines de ses mesures, en particulier les perquisitions administratives et l’interdiction de réunions publiques, en argumentant que « la persistance de l’état d’urgence plus de deux mois après son déclenchement est constitutive d’une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ». L’utilisation de ces mesures d’exception contre des personnes qui n’avaient rien à voir ni de près ni de loin avec le terrorisme a été maintes fois dénoncée, comme par exemple l’expulsion massive de sans-papiers ou l’assignation à résidence de militants écologistes pendant la COP21.

Allant bien au-delà de la lutte contre les projets d’attentats terroristes, l’état d’urgence est l’occasion pour le gouvernement d’afficher une attitude autoritaire, en en profitant au passage pour restreindre le droit de manifester, de se réunir et de s’exprimer ou pour menacer les travailleurs qui cherchent à se défendre.

C’est avec raison que, ces prochains jours, de nombreuses manifestations seront organisées contre la dérive sécuritaire du gouvernement Hollande.

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