Fusions de communes : le chantage minable du gouvernement27/01/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/01/2478.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Fusions de communes : le chantage minable du gouvernement

Faute de faire diminuer le nombre de chômeurs, le gouvernement arrive à faire diminuer le nombre de communes. Et cela semble le satisfaire, puisqu’il vient de s’en vanter bruyamment.

Un communiqué du secrétaire d’État à la Réforme territoriale, André Vallini, a annoncé triomphalement le 8 janvier que le nombre de communes en France était tombé sous les 36 000 – à 35 945 exactement, contre 36 658 il y a un an. La cause de cette diminution est le dispositif des « communes nouvelles », qui permet à plusieurs communes de fusionner en une seule. Le mouvement a en effet fortement accéléré en 2015, avec la création de 300 communes nouvelles et la disparition d’environ un millier d’autres. Des communes de toutes tailles sont concernées, depuis de tout petits villages ruraux de quelques dizaines d’habitants, jusqu’à une ville comme Cherbourg, qui vient d’absorber sa banlieue.

Ce dont le gouvernement se vante un peu moins, c’est qu’à l’évidence, ce sont les difficultés financières qu’il a lui-même créées qui poussent les élus locaux à fusionner. La loi permettant la création de communes nouvelles de ce type n’est en effet pas nouvelle : elle date de 2010 (c’est la loi RCT, pour « Réforme des collectivités territoriales » du 16 décembre 2010). Elle n’avait jusque-là jamais suscité un intérêt particulier chez les maires – en 2014, à peine une vingtaine de communes nouvelles s’étaient ainsi formées. Pourquoi alors ce succès soudain ? La réponse est simple : selon les termes d’une autre loi, promulguée elle en mars 2015, les communes qui auraient fusionné avant le 31 décembre 2015 échappaient au couperet de la baisse drastique des dotations de l’État aux collectivités locales.

C’est donc un vrai petit chantage auquel se livre le gouvernement : « Si vous voulez garder un niveau de dotations permettant de fonctionner, fusionnez ! », dit-il aux maires. Et vu la coupe claire annoncée (– 3,5 milliards d’euros pour les communes), beaucoup n’ont pas vraiment eu le choix, et leur décision a été prise la corde au cou. Le gouvernement a d’ailleurs annoncé, fort de son succès, que ce dispositif d’incitation financière serait prolongé jusqu’au 30 juin 2016, espérant que quelques centaines d’autres communes s’y rallieront.

Pour l’État, le bénéfice est évident : avec moins de communes, le projet est à terme de diminuer les dotations et les dépenses. Pour les habitants, en revanche, cela représente un recul. Dans certaines zones rurales, par exemple, des communes situées parfois à plusieurs dizaines de kilomètres les unes des autres ont fusionné. En montagne, des fusions de communes ont touché des villages n’étant pas dans la même vallée. Il faudra donc aux habitants faire des kilomètres pour accéder ne serait-ce qu’à la mairie. Sans parler du fait que des communes de petite taille, comme il en existe des milliers, où tout le monde se connaît et connaît le maire, permettent aux habitants une certaine forme de contrôle sur la gestion communale, qui s’amenuisera dans les communes nouvelles.

La baisse brutale des dotations de l’État aux collectivités locales a déjà des conséquences directes et graves pour les habitants : baisse du niveau de service public communal, hausse des impôts locaux. La diminution du nombre de communes en est une autre.

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