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Guerre d'Algérie : Quand Mitterrand approuvait la peine de mort
Un livre récemment publié, François Mitterrand et la guerre d'Algérie, écrit par l'historien Benjamin Stora et le journaliste François Malye, fait état de certains faits étouffés par Mitterrand, son entourage, mais aussi les principaux partis politiques : l'exécution de nationalistes algériens pendant la guerre d'Algérie, qu'il avait approuvée en tant que garde des Sceaux.
Ministre de l'Intérieur dans le gouvernement du socialiste Guy Mollet en novembre 1954, lors du déclenchement de la guerre d'Algérie, Mitterrand fut ensuite ministre de la Justice à partir du 1er février 1956, pendant seize mois. Dès son entrée en fonction, il donna son accord pour que soient appliquées des condamnations à mort et, un mois plus tard, il signa les décrets décidant des « pouvoirs spéciaux », visant les combattants nationalistes algériens et ceux qui les soutenaient. Les personnes « prises en flagrant délit de participation à une action contre les personnes ou les biens » furent désormais jugées par des tribunaux militaires d'exception, « sans instruction préalable » et « même si ces infractions (étaient) susceptibles d'entraîner la peine capitale ».
S'ajoutant aux centaines de milliers de crimes commis par l'armée française et les ultras, partisans de l'Algérie française, 198 prisonniers politiques furent ainsi exécutés durant la guerre d'Algérie, parfois au rythme de cinq par jour. L'ouverture partielle du registre des grâces montre que, pendant qu'il était garde des Sceaux, Mitterrand a donné son accord pour la peine de mort dans 80 % des cas connus qui lui ont été soumis, dont celui du militant communiste Fernand Yveton, exécuté le 11 février 1957 pour avoir posé une bombe qui n'explosa pas.
De même qu'il s'était montré très discret sur ses sympathies envers le régime de Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale, Mitterrand n'est jamais revenu sur les exécutions capitales qu'il a approuvées. Quant à tous ceux qui l'ont soutenu, avant et après son accession à la présidence, du Parti Communiste aux intellectuels qui s'affirmaient pourtant anticolonialistes, ils furent tout aussi discrets sur cette période de la vie de Mitterrand. Cela aurait nui à l'étiquette d'« homme de gauche » qu'ils avaient affichée sur ce politicien carriériste, fidèle défenseur de l'empire colonial français.