Unifier les luttes pour vaincre14/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1657.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Editorial

Unifier les luttes pour vaincre

La liste des entreprises où naissent des conflits dûs aux conséquences défavorables pour les salariés de l'introduction des 35 heures s'allonge de jour en jour, dans le secteur public comme dans le privé. A La Poste, la grève du centre de distribution de Nice-Thiers est entrée dans sa quatrième semaine et s'étend aux autres postiers du secteur. A la Caisse d'Epargne, la grande majorité des agences de la région Rhône-Alpes ont été en grève la première semaine d'avril. Aux Aéroports de Paris, des mouvements ont commencé le week-end des 8 et 9 avril. Les usines SAFT du Sud-Ouest, filiales d'Alcatel, sont en grève depuis le début du mois et bien d'autres conflits encore sont en cours.

La plupart des journalistes de la presse patronale font mine de s'étonner de ces mouvements, qu'ils présentent comme la manifestation de la résistance au changement, du conservatisme ou du corporatisme des travailleurs concernés. Car ces gens-là, tout comme les responsables du gouvernement, ont présenté la loi Aubry comme une loi favorable aux travailleurs qui aurait tout naturellement dû rencontrer l'assentiment de ces derniers.

Mais ce ne sont pas les travailleurs qui s'opposent stupidement à une loi qui leur serait favorable. Ce sont les gens qui nous gouvernent, et les commentateurs, qui prennent leurs déclarations pour argent comptant, qui nous mentent quand ils présentent la loi Aubry comme un progrès, alors qu'elle est une loi de régression sociale.

Lors des élections de 1997, Jospin avait parlé de ramener la durée de la semaine de travail à 35 heures pour piper les voix des travailleurs. Mais une fois arrivé au gouvernement, il n'était plus question de réduire purement et simplement la durée du travail. Ce n'était plus le temps passé au travail qui était pris en considération pour calculer ces fameuses 35 heures, mais le " temps de travail effectif ", ce qui fait qu'à coups de suppression des temps de pause ou de casse-croûte, bien des salariés travaillent aussi longtemps dans le cadre de la nouvelle loi qu'auparavant.

Et puis, pour faire plaisir à un patronat qui crie toujours très fort dès qu'il entend prononcer le mot " social ", la loi Aubry lui a donné la possibilité de négocier, en contrepartie de cette très relative diminution du temps de travail, des accords comprenant l'annualisation du temps de travail, la " flexibilité " qui permet aux employeurs de fixer les horaires en fonction de leurs seuls intérêts ou des seuls aléas de la production, sans se soucier de la vie personnelle, de la vie de famille ou de la santé des salariés. Cela signifie que dans bien des entreprises la loi Aubry est un prétexte pour tenter d'imposer des horaires d'équipes déments, le travail de nuit ou le travail du samedi.

Cela est vrai y compris dans le secteur public, comme le montre l'exemple des postiers niçois qui refusent, à juste titre, de travailler plus de deux samedis par mois, et surtout de ne pas pouvoir prévoir quand ils devront travailler le samedi.

C'est cela le fond du problème. C'est pourquoi les mouvements actuels ne peuvent pas rester isolés. Au fur et à mesure que le patronat essaiera d'imposer la " flexibilité " que la loi Aubry autorise, les travailleurs n'auront d'autre choix que de résister à une telle offensive générale du patronat contre leurs conditions de travail et de vie.

Cela signifie que nous devons bien sûr être solidaires de tous les travailleurs qui sont actuellement en lutte, ceux du privé comme ceux du public, car en défendant leurs propres conditions de vie, ils défendent du même coup celles de tout le monde du travail.

Mais cela signifie aussi que la situation met à l'ordre du jour la nécessité d'unifier toutes ces luttes, qui ont un objectif commun, car seule une riposte d'ensemble de la classe ouvrière pourra faire reculer le patronat et le gouvernement à son service.

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