Pologne : les surenchères réussissent à la droite04/11/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/11/2466.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Pologne : les surenchères réussissent à la droite

Aux élections législatives et sénatoriales du 25 octobre en Pologne, c’est le PiS (le parti Droit et justice créé en 2001 par les frères Kaczynski) qui, avec 37,6 % des voix, a devancé tous les autres, en particulier le parti de la droite libérale, PO (Plate-forme citoyenne), qui détenait jusqu’alors la majorité et se retrouve avec 24,1 %.

Autre résultat remarquable : la gauche, pour le rassemblement Gauche unifiée, n’a obtenu que 7,55 % des voix, tandis qu’un nouveau petit parti, classé plus à gauche que ce rassemblement, obtenait 3,62 %. Pour la première fois depuis 1989, la gauche n’a aucun élu, car la barre pour cela est à 8 % des voix. Autre fait également notable, le chanteur Kukiz, qui avait fait une percée il y a quelques mois lors des élections présidentielles, la confirme à ces élections en obtenant 8,8 %. Mais le trublion antisystème des présidentielles a dévoilé son goût pour l’extrême droite, dont il a mis des membres sur ses listes, et a réservé ses invectives aux étrangers.

Pour le PiS, c’est un retour au pouvoir huit ans après l’avoir perdu, en 2007. Mais ce n’est pas le seul résultat de ces élections car, si l’on additionne le PiS, Kukiz et l’extrême droite traditionnelle, on obtient 51,1 % des voix, ce qui témoigne d’un glissement à droite de la société polonaise.

Onze ans après l’entrée de la Pologne dans l’Union européenne, et après que pendant des années PO eut défendu la collaboration la plus étroite avec l’UE, ces résultats témoignent peut-être du début du déclin des illusions dans l’Union. Certes, la Pologne a connu une des croissances économiques les plus fortes des pays de l’Est européen, certes son industrie et son agriculture ont été transformées et modernisées, mais tous ces changements ont surtout bénéficié aux grands groupes d’Europe de l’Ouest. Dans le contexte de la crise actuelle, ces changements se sont faits sans cadeau à la population laborieuse, et avec même des reculs, comme le passage de l’âge de la retraite à 67 ans décidé par le précédent gouvernement PO.

Dans ce contexte, le PiS n’a eu aucun mal à faire de la surenchère nationaliste et populiste, parlant de « repoloniser » l’économie mais aussi développant tout un catalogue de promesses sociales, certaines bien orientées dans le sens de la droite traditionnaliste, comme une allocation aux familles à partir du deuxième enfant, voire du premier si leurs ressources sont très faibles, ou d’autres qui ont touché la population, comme la promesse de mettre la retraite à 60 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes. Et le PiS s’est aussi emparé des événements récents, comme le passage des réfugiés dans l’UE, entre autres par la Hongrie, la Croatie et la Slovénie, pour attiser toutes les peurs à ce sujet, non sans succès.

Sans qu’aucun afflux de réfugiés ait touché la Pologne, PO avait accepté de discuter des quotas à accueillir, ergotant autour du chiffre ridiculement bas de 2 200 réfugiés. Le PiS, qui proclame son admiration pour le dirigeant de droite hongrois Viktor Orban, s’est mis à évoquer la « charia qui règne dans certaines régions » qui en Europe ont une population immigrée nombreuse. Kaczynski a parlé du « choléra qui sévit déjà sur les îles grecques, de la dysenterie à Vienne, et de toutes sortes de parasites qui chez ces gens (les réfugiés, NDLR) peuvent ne pas être dangereux, mais qui peuvent l’être pour les populations locales ». Kukiz a renchéri en disant qu’il fallait se demander « s’il fallait vraiment accueillir des terroristes ». Et le 27 septembre une manifestation contre l’accueil de réfugiés en Pologne regroupait le chiffre élevé de 30 000 participants.

Comme nombre d’autres sociétés d’Europe centrale, la Pologne est donc touchée par la montée du chauvinisme et du populisme. Et cela n’augure rien de bon pour les travailleurs polonais.

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