Projet de réforme des retraites : Un seul objectif : faire payer les travailleurs23/06/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/06/une-2186.gif.445x577_q85_box-0%2C15%2C162%2C225_crop_detail.png

Leur société

Projet de réforme des retraites : Un seul objectif : faire payer les travailleurs

Attendre deux ans de plus avant de verser aux travailleurs une retraite amputée. Tel est le projet du gouvernement pour cette réforme à laquelle il a le culot d'affirmer qu'il procède au nom de « l'équité ».

Dans le secteur privé, en repoussant chaque année de quatre mois l'âge légal de départ en retraite, celui-ci sera fixé à 62 ans au 1er janvier 2018. À cette même date, il faudra avoir 67 ans au lieu de 65 pour toucher une retraite à taux plein quand on n'a pas toutes ses annuités. Dans la mesure où, selon les chiffres officiels, 60 % des salariés entre 55 et 64 ans sont privés d'emploi, c'est dire le nombre de vieux travailleurs qui vont devoir, pendant deux années supplémentaires, essayer de survivre avec des allocations de solidarité et se débrouiller avec la précarité pour finir par toucher une retraite diminuée.

Depuis vingt ans, tous les gouvernements se sont répandus sur les risques de faillite du système de retraite et la nécessité de le réformer en économisant sur les pensions versées.

DE RECUL EN RECUL

Rocard, un ministre socialiste, en fut l'initiateur en 1991 avec son Livre blanc sur les retraites. Mais c'est Balladur, un ministre de droite sous la présidence de Mitterrand, qui, deux ans plus tard, le mit en pratique avec un allongement progressif de la durée de cotisation de 37,5 années à 40 ans pour les salariés du privé et un système de calcul basé sur les vingt-cinq meilleures années au lieu de dix au préalable. Juppé, en 1995, s'essaya à imposer le même système aux fonctionnaires mais fut contraint d'abandonner par des grèves et de grandes manifestations. C'est Fillon qui y parvint en 2003, en même temps qu'il imposa un allongement de la durée de cotisation à 41 ans, au prétexte de l'allongement de l'espérance de vie. Aujourd'hui, Éric Woerth poursuit la sale besogne.

LE SECTEUR PUBLIC AUSSI

Le principe de l'augmentation de la durée de cotisation initié par Fillon est maintenu et prévoit le passage à 41,5 ans en 2020... si les chiffres de l'Insee sur l'espérance de vie n'augmentent pas plus vite que prévu.

Pour les fonctionnaires, à raison de quatre mois de cotisation de plus chaque année, en 2018, ceux qui dans le système actuel pouvaient partir en retraite à 60 ans, devront attendre jusqu'à 62 ans ; et tous les fonctionnaires devront travailler deux ans de plus avant d'y avoir droit. De plus, alors qu'ils peuvent aujourd'hui percevoir le minimum garanti de pension dès qu'ils atteignent l'âge légal de la retraite, même s'ils n'ont pas tous leurs trimestres, au nom de « l'équité », les fonctionnaires devront désormais les avoir tous ou attendre l'âge du taux plein. Et puis, « afin de maintenir l'égalité de traitement entre les Français », le gouvernement prévoit de porter leur taux de cotisation de 7,85 % aujourd'hui à 10,55 % en 2020. C'est dire la baisse de salaire qui ira avec... De quoi provoquer parmi les fonctionnaires la même colère qu'en 1995 !

USES JUSQU'AU BOUT

La mesure annoncée sur la pénibilité du travail est celle qui montre le plus crûment le mépris du gouvernement pour les travailleurs. Le droit à la retraite à 60 ans à taux plein est maintenu pour « les assurés dont l'état de santé est dégradé à la suite d'expositions à des facteurs de pénibilité liés à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail. » Mais, précise le texte, « le droit est accordé de manière individuelle. » Pour y prétendre, les travailleurs devront donc apporter la preuve qu'ils ont un taux d'incapacité d'au moins 20 %, donnant droit à une rente pour maladie professionnelle ou accident du travail. Il leur faudra aller chercher auprès des médecins du travail le certificat attestant qu'ils sont réellement estropiés par l'exploitation. Et le texte d'ajouter : « Les salariés doivent être physiquement usés au moment du départ à la retraite. » Ainsi, un travailleur qui aura respiré des solvants nocifs pendant toute sa vie professionnelle mais qui, à 60 ans, ne sera pas encore invalide, devra continuer à travailler pendant deux ans. C'est infâme !

INEQUITABLE ET INJUSTE

Les mots « équité », « équitable », « justice... », reviennent pratiquement à toutes les pages de ce projet qui promet « l'équilibre des régimes de retraite » pour 2018. Mais entre les travailleurs et leurs exploiteurs, il en est qui sont plus égaux que d'autres.

En effet, sur les 42 milliards de recettes attendus pour parvenir à cet équilibre, le gouvernement annonce une augmentation des contributions des entreprises ainsi qu'une augmentation de la taxation des hauts revenus, des stock-options, des retraites-chapeaux, des revenus du capital et des plus-values, etc. Au total, ces mesures devraient rapporter « plus de 4 milliards d'euros de recettes nouvelles ». C'est-à-dire, que pour le reste, pour 38 milliards, ce seront donc les économies faites sur le dos des salariés qui approvisionneront les caisses de retraite.

Ce projet n'a qu'un objectif : diminuer le montant des pensions versées aux vieux travailleurs et augmenter encore leur taux d'exploitation. Il est inacceptable !

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