Venezuela – Guyana : une odeur de pétrole13/12/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/12/2889.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Venezuela – Guyana : une odeur de pétrole

Jeudi 14 décembre, des représentants du Venezuela et du Guyana devaient se rencontrer pour trouver une solution au conflit qui les oppose au sujet d’une province de Guyana où, en 2 015, la société Exxon a découvert une importante réserve de pétrole.

En cette période où les feux guerriers s’allument sur toute la planète, les dirigeants chavistes du Venezuela ont décidé de réveiller une vieille revendication de leur pays sur cette province de leur voisin, l’Essequibo.

À quelques jours d’un scrutin présidentiel que le dirigeant venezuelien Maduro espère remporter une fois de plus, c’est pour lui une occasion de bomber le torse face à son adversaire de droite. Le 3 décembre, Maduro a même organisé un référendum sur ce sujet et les électeurs ont répondu à 95 % pour que la province revendiquée tombe dans l’escarcelle du Venezuela. Les habitants de l’Essequibo, eux, n’ont pas été consultés.

Le président du Guyana, Mohamed lrfaan Ali, a déclaré de son côté qu’il ne laisserait pas son pays se faire piétiner par une puissance étrangère. Et il a reçu aussitôt l’appui des États-Unis.

L’Essequibo faisait partie du Venezuela quand celui-ci était encore une colonie espagnole. C’est au début du 19e siècle, à la suite de l’indépendance du Vene- zuela, que la Grande-Bretagne, qui venait de constituer sa colonie esclavagiste du Guyana, s’est emparée de cette région. En 1899, un tribunal d’arbitrage donna raison au colonisateur britannique. Aujourd’hui, si la région de l’Essequibo représente 62 % de la superficie du Guyana, elle ne regroupe que 125 000 habitants. Mais ses richesses en or, cuivre, diamant, bauxite et maintenant pétrole aiguisent les appétits.

La revendication de ce territoire par le régime chaviste peut n’être qu’une diversion pour remporter l’élection en faisant jouer la corde nationaliste et faire oublier une situation économique désespérée, marquée par l’hyperinflation, l’explosion de la misère et l’exode massif de la population vers les pays voisins. Mais la tension s’est accrue entre les deux pays depuis qu’en 2015, Exxon Mobil a choisi de traiter avec le Guyana plutôt qu’avec son voisin pour l’exploitation des réserves de pétrole récemment découvertes. Le gouvernement vénézuélien a déclaré illégales les concessions pétrolières et dénonce le Guyana comme l’instrument docile de l’impérialisme américain, et d’Exxon en particulier. En l’occurrence, l’anti-impérialisme de Maduro n’est que de façade. Il a adopté dès le début de son mandat, face aux groupes capitalistes, la même politique servile que son voisin. Entre 2014 et 2017, sans tenir compte des difficultés économiques de la population, il a donné la priorité au remboursement de la dette, versant à ses créanciers 71 milliards de dollars en trois ans, au détriment de l’éducation ou de la santé. Il a aussi livré sans conditions une partie des activités pétrolières à la compagnie américaine Chevron et ouvert en 2022 des zones économiques spéciales offrant de multiples avantages aux groupes capitalistes. Par des accords secrets, l’exploitation des gisements d’or, de bauxite, de coltan ou de diamant le long du fleuve Orénoque a été livrée aux filiales de multinationales.

Derrière les surenchères nationalistes de Maduro ou d’Irfaan Ali, les groupes pétroliers sont à la manœuvre pour piller les ressources de la région. Les deux États, soumis de la même manière à l’impérialisme, ne peuvent que se disputer les miettes que les multinationales veulent bien leur laisser. Cette dispute peut mener à un engrenage guerrier que les populations paieraient cher.

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