Innovation : à quoi sert l’argent public13/12/20232023Journal/medias/journalarticle/images/2023/12/P5-1_Aides_aux_patrons_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C298%2C3200%2C2099_crop_detail.jpg

Leur société

Innovation : à quoi sert l’argent public

Il y a deux ans, Macron avait lancé le projet France 2030 : 54 milliards d’euros d’investissements, dont au moins un tiers de subventions publiques. Lundi 11 décembre, il a annoncé encore plus de milliards donnés au grand patronat sans aucun retour ni contrôle.

Illustration - à quoi sert l’argent public

L’argument de la concurrence étrangère est mis en avant : il ne faudrait pas se laisser marginaliser par les concurrents américains et asiatiques. Tout cela au nom de la souveraineté et du plein emploi. Comme à chaque fois, on fait miroiter au grand public des projets technologiques époustouflants : un cargo spatial, la fusion nucléaire comme nouvelle source d’énergie, de nouveaux composants électroniques pour l’intelligence artificielle… sans oublier l’écologie. Macron a parlé de missions d’exploration de réservoirs d’hydrogène naturel, l’hydrogène blanc.

Mais la réalité est beaucoup plus prosaïque. Il y a une concurrence à toutes les échelles, et le grand patronat français compte sur son État pour le soutenir dans cette guerre économique. Ce qui comptera pour ces capitalistes ne sera pas les découvertes ou les avancées technologiques, encore moins les emplois créés, mais d’avoir placé l’argent là où il rapportera.

Une start-up française spécialisée dans l’intelligence artificielle, Mistral AI, s’est vantée ces jours-ci d’avoir levé 385 millions d’euros. Combien de millions proviennent du plan France 2030, avec une bonne part d’argent public ? Et que va faire Mistral AI de tout cet argent ? Va-t-elle créer des milliers d’emplois ? Pendant la pandémie de Covid, des start-up ayant vampirisé la recherche effectuée pendant des années dans les laboratoires publics ont accumulé des milliards en quelques mois grâce à la spéculation...

L’État dit que ce sont pour moitié des PME qui ont touché l’argent. C’est avouer que ce sont de grands groupes qui ont raflé l’autre moitié. Mais en réalité c’est bien plus. Car bien des PME sont des filiales de très grandes entreprises. Et quel contrôle y a-t-il sur l’utilisation de ces fonds ? Macron lui-même a décidé qu’il fallait une « hyper- simplification » pour que les entreprises, à commencer par les plus grosses qui ont leurs entrées au gouvernement, puissent se servir dans les caisses de l’État. Comprenez : l’État va verser ces sommes sans le moindre engagement en retour.

En 2021, des dizaines de milliards ont été annoncés pour des projets à faire rêver. En 2030, il y aura sûrement de nouveaux multi­milliardaires. Mais des cargos spatiaux ou quoi que ce soit d’un peu utile, rien n’est moins sûr. Peut-être, il est vrai, y aura-t-il des canons plus modernes, même si Macron a oublié de mentionner ce secteur industriel plein d’avenir ?

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