Décembre 1991 : la fin de l’URSS, pas des idées communistes14/12/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/12/LO2524.jpg.445x577_q85_box-0%2C15%2C189%2C259_crop_detail.jpg

il y a 25 ans

Décembre 1991 : la fin de l’URSS, pas des idées communistes

En décembre 1991, les commentateurs occidentaux se réjouirent de la dissolution de l’Union soviétique (URSS) et de son éclatement en quinze États différents, présentés comme l’échec du communisme. Un pseudo-intellectuel affirma qu’on était parvenu à la fin de l’histoire, le capitalisme étant devenu l’horizon indépassable de l’humanité.

À en croire les dirigeants des puissances impérialistes et les médias, la démocratie, la liberté et la prospérité étaient promises aux républiques issues de l’URSS. Un quart de siècle plus tard, on ne peut que constater les conséquences funestes entraînées par l’éclatement de l’URSS, sur le plan social, économique et politique : l’explosion des inégalités, la misère qui a rejeté loin en arrière plusieurs républiques ex-soviétiques et frappe même un quart de la population de Russie, et les nombreux conflits armés

L’URSS, née dans la perspective de la révolution mondiale

L’Union des républiques socialistes soviétiques, fondée le 30 décembre 1922, était fille de la révolution prolétarienne d’Octobre 1917. L’intervention impérialiste contre la Russie des soviets n’ayant pas abouti à son écrasement, les territoires défendus victorieusement par le prolétariat s’unirent dans une Fédération des républiques de Russie, d’Ukraine, de Biélorussie et de Transcaucasie. Son territoire en faisait le plus grand État du monde.

L’existence même de l’URSS témoignait de la possibilité d’une autre voie que le capitalisme, sans propriété privée des moyens de production ni domination des lois du marché sur l’économie. Elle montrait que la classe ouvrière pouvait instaurer une société dans laquelle elle gouvernerait elle-même l’État. Pour cette raison, l’impérialisme ne pardonna jamais à l’URSS ses origines révolutionnaires.

Le parasitisme de la bureaucratie stalinienne

Le recul de la vague révolutionnaire au début des années 1920 entraîna l’isolement de l’URSS. Une couche sociale privilégiée, la bureaucratie, se développa à la tête de l’État, usurpant le pouvoir du prolétariat.

Les bureaucrates n’étaient pas des capitalistes. Même s’ils aspiraient à s’enrichir, en URSS personne n’était officiellement autorisé à posséder les moyens de production que la révolution avait collectivisés. Leur richesse, plus ou moins dissimulée, provenait uniquement du pillage des ressources de l’État et des organismes économiques, qu’ils contrôlaient. Une lutte acharnée avait lieu en permanence entre les différents clans de la bureaucratie pour le partage du gâteau.

C’est pour empêcher ces rivalités de mettre en danger la stabilité de l’URSS et les intérêts de la bureaucratie que Staline imposa à toute la société une dictature de fer.

Tournant le dos à la perspective de la révolution mondiale, qui seule aurait permis de sortir l’URSS de son isolement et de sa relative arriération, Staline lança le mot d’ordre empoisonné du « socialisme dans un seul pays ». Les oppositionnels restés fidèles aux idéaux de la révolution et à l’internationalisme furent massacrés.

Un développement économique hors des lois du marché

L’économie soviétique se construisit grâce au dynamisme engendré par la révolution. La bourgeoisie ayant été expropriée, la mise en œuvre de plans quinquennaux successifs, à l’échelle de toute l’Union, guida la production.

L’industrie soviétique décolla, alors que l’économie mondiale s’effondrait sous l’effet de la crise de 1929. Ses taux de croissance spectaculaires firent écrire à Trotsky, ennemi de la bureaucratie stalinienne, que, malgré celle-ci et les tares d’une société encore arriérée, le socialisme avait « démontré son droit à la victoire, non dans les pages du Capital, mais dans une arène économique couvrant le sixième de la surface du globe ».

Malgré la dictature et la bureaucratie, malgré les ravages provoqués de la Deuxième Guerre impérialiste mondiale, le développement économique se poursuivit jusque dans les années 1970, l’Union soviétique atteignant le rang de deuxième puissance économique mondiale, derrière les États-Unis.

L’éclatement de l’URSS

À la mort de Staline en 1953, les rivalités entre bureaucrates se traduisirent par une lutte acharnée, jusqu’au sommet de l’État. Contenues durant presque trente ans, elles finirent par éclater en un affrontement généralisé à la mort de Brejnev, en 1982.

Pour asseoir son pouvoir, Gorbatchev, élu nouveau secrétaire général du Parti communiste en mars 1985, ne pouvait plus compter sur les clans dirigeants des quinze républiques soviétiques : devenus de plus en plus puissants, ces clans affichaient leur autonomie vis-à-vis du pouvoir central.

Gorbatchev chercha alors d’autres soutiens, auprès de certaines couches de la bureaucratie, de la petite bourgeoisie intellectuelle, et plus largement d’une partie de l’opinion publique attirée par le modèle occidental. Il parla de refonte du système et de l’économie, la perestroïka. Il affirma la nécessité de la glasnost, la liberté de s’exprimer. Il introduisit une dose de suffrage universel, notamment pour l’élection du président de chaque république. Il laissa enfin entrevoir, à tous ceux qui en auraient l’opportunité, l’espoir de s’enrichir librement. Mais, sur ce terrain, il fut débordé par plus démagogue que lui.

S’étant fait élire à la tête de la république de Russie en juin 1991, Eltsine encouragea les républiques à prendre le plus d’autonomie vis-à-vis du pouvoir central. Ce qu’elles firent jusqu’à faire éclater l’Union, forcer Gorbatchev à démissionner et à entériner la fin de l’URSS, le 25 décembre 1991.

Un recul pour les travailleurs et les peuples

L’URSS ne périt donc pas de l’effondrement de son économie, contrairement à l’affirmation intéressée des laudateurs du capitalisme. C’est son démantèlement par en haut, aboutissement d’un processus lié au parasitisme croissant de la bureaucratie, qui provoqua la désagrégation de l’État et un effondrement économique brutal.

En Russie, Eltsine libéralisa les prix, qui s’envolèrent, et lança des programmes de privatisation. Ce fut la ruée des bureaucrates les mieux placés pour dépecer les entreprises et s’approprier tout ce qui, dans l’économie, pouvait être rapidement rentable.

À la fin des années 1990, après le krach financier de 1998, la stabilité même des pays de l’ex-URSS se trouvait menacée par le chaos économique et politique, le banditisme à grande échelle des sommets dirigeants, l’explosion des nationalismes et des conflits à caractère ethnique. Arrivé à la tête de la Russie en 2000, Poutine se donna pour tâche de rétablir la « verticale du pouvoir », dans l’intérêt de la bureaucratie dans son ensemble. Il imposa que les affairistes se soumettent à l’État et paient leurs impôts, tout en permettant leurs pillages, avec comme perspective la réintégration de la Russie dans le marché mondial.

Mais le capitalisme en crise n’est plus capable de progrès depuis longtemps déjà. Il est incapable de se substituer efficacement à l’économie et aux rapports sociaux hérités des soixante-dix ans d’existence de l’URSS, si ce n’est pour permettre à une minorité de s’enrichir.

La fin de l’URSS a marqué une étape décisive dans le processus réactionnaire dont le stalinisme avait été l’incarnation sanglante, et il n’y a pas lieu de se réjouir de l’évolution en cours. La perspective d’une future Union socialiste mondiale des travailleurs reste la seule qui permettra à l’humanité de reprendre sa marche en avant.

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