Hôpital Hôtel-Dieu de Paris : Un démantèlement programmé08/11/20132013Journal/medias/journalnumero/images/2013/11/une2362.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Hôpital Hôtel-Dieu de Paris : Un démantèlement programmé

Depuis le lundi 4 novembre, il n'y a plus de médecin urgentiste en poste à l'Hôtel-Dieu. Le service des urgences a disparu et une « maison médicalisée », dont personne à l'hôpital ne sait exactement ce que c'est, est censée prendre sa place.

Depuis plusieurs années la direction de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) a pris la décision de vider l'Hôtel-Dieu de ses services d'hospitalisation. Ils sont transférés à l'hôpital Cochin, et au passage des lits sont supprimés, ainsi que des emplois de soignants. Cela, sans tenir aucun compte des problèmes de transport des employés, qui habitent souvent en grande banlieue. Travailler à l'Hôtel-Dieu, en plein centre de Paris, où il est impossible de se loger avec un salaire de travailleur et où il est très compliqué de venir en voiture, signifie déjà des temps de transport qui tournent entre deux et trois heures par jour. Mais se rendre dans un autre hôpital peut aggraver encore à cette galère quotidienne.

Le démantèlement progressif de l'hôpital, qui a vu partir le service de réanimation indispensable pour que les Urgences fonctionnent en toute sécurité, a été prévu de longue date pour ne laisser comme issue que la fermeture.

Pourtant partout dans le pays, et à Paris aussi, les services d'urgences sont complètement saturés. D'autant plus qu'on en ferme régulièrement alors que les besoins augmentent, beaucoup de malades n'ayant que les Urgences comme recours. En 1988, il y a eu 3 millions de passages dans l'un des 3 000 services d'urgences du pays. En 2013, on s'attend à 18 millions de passages dans les 690 services qui restent. C'est dire que les temps d'attente s'allongent pour les patients, pendant que les médecins, infirmières et aides-soignantes, toujours moins nombreux, s'épuisent au cours de journées de travail à rallonge.

Tout cela est tellement choquant que la ministre de la Santé, Marisol Touraine s'est sentie obligée de promettre cet été un moratoire, c'est-à-dire un report de la fermeture des Urgences de l'Hôtel-Dieu. Mais ce qui était une manœuvre s'avère aujourd'hui un mensonge pur et simple.

Inquiets pour les futures élections municipales, Bertrand Delanoë, l'actuel maire de Paris, et Anne Hidalgo qui brigue sa succession, tous deux au Parti socialiste, prennent une posture ferme, s'opposant en paroles à ce démantèlement qu'organise le gouvernement qu'ils soutiennent. Leur rivale Nathalie Kosciusko-Morizet, ancienne ministre du gouvernement de droite sous lequel l'Hôtel-Dieu a commencé à voir ses services partir, se dit elle aussi maintenant opposée à la fermeture des Urgences.

Cette agitation politicienne devant les médias ne perturbe évidemment en rien l'AP-HP et le gouvernement qui lui donne des ordres, qui continuent de détruire méthodiquement cet hôpital. Les derniers services d'hospitalisation doivent partir dans les mois qui viennent, sans que ceux qui y travaillent, qui sont pourtant les premiers concernés, ne sachent rien de précis. On sait par contre que le siège de l'AP-HP devrait emménager dans les locaux vides de l'Hôtel-Dieu, en cohabitation avec le Centre de diagnostic. Cela libérerait l'immeuble de l'avenue Victoria qui abrite aujourd'hui la direction de l'AP-HP.

C'est donc une belle opération immobilière en perspective pour les promoteurs, alléchés par ce site en face de l'Hôtel de Ville de Paris. Mais l'argent qui sera peut-être issu de la vente ne servira certainement à améliorer ni le sort des dizaines de milliers de salariés de l'AP-HP, ni les soins et le confort des patients.

Partager