Les élections du 7 juin : Piètres résultats pour l'UMP, et encore plus pour le PS10/06/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/06/une2132.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Elections européennes

Les élections du 7 juin : Piètres résultats pour l'UMP, et encore plus pour le PS

« L'onde de choc », titrait un quotidien au lendemain des élections européennes. « Un séisme », soulignait un autre. Si cela en était un, c'était dans un bac à sable... Ces élections, dont les résultats passionnent tant les commentateurs et excitent les dirigeants des partis politiques, se sont déroulées dans un climat d'indifférence dans la majorité de la population. Cette indifférence a marqué la campagne elle-même comme les résultats.

Avec un taux de 59,35 %, la courbe des abstentions aux élections européennes atteint un sommet. 40,65 % de l'électorat seulement se sont donné la peine de se déplacer. À cela s'ajoutent les 4,34 % qui ont voté blanc ou nul.

L'abstention a été particulièrement élevée dans les villes ou les quartiers populaires. Il est par exemple caractéristique que, dans un département de la banlieue parisienne comme la Seine-Saint-Denis, si dans quelques villes comme Le Raincy, Gournay-sur-Marne, Neuilly-Plaisance ou Villemomble le nombre de votants atteint voire dépasse la moyenne nationale, dans les villes les plus populaires, il est nettement en dessous (Aubervilliers, 27,4 % ; Bobigny, 25,4 % ; Clichy-sous-Bois, 22,6 % ; Stains, 22,1 %).

En conséquence, « la victoire de l'UMP », titre du Figaro, ou « le résultat historique », dont se vantent les dirigeants de l'UMP, se mesurent à l'aune de cette abstention. Manifestement, à l'abstention signe d'apolitisme et de désintérêt, s'ajoute une abstention de protestation aussi bien contre le parti au pouvoir que contre le principal parti d'opposition, le Parti Socialiste.

L'UMP en profite pour clamer que ses résultats confirment l'accord de la population avec la politique de « réformes » de Sarkozy, ainsi que sa brillante prestation pendant les six mois où il a assuré la présidence de l'Union européenne. Le ridicule ne tuant pas, on a même entendu il y a quelques jours le chef de l'UMP, Xavier Bertrand, affirmer que, grâce à Sarkozy, l'Union européenne avait évité d'être entraînée dans la guerre entre la Géorgie et la Russie ! En écoutant ces tartarinades, il faut avoir à l'esprit que les 27,87 % recueillis par le parti gouvernemental ne représentent que 12 % de l'électorat. L'UMP sarkozyste est habituée à cette escroquerie qui consiste à présenter toutes ses mesures, même les plus violemment antipopulaires, comme des mesures voulues par la majorité de la population.

Un autre aspect à relever est le mauvais résultat du Parti Socialiste qui réalise, avec 16,48 %, un de ses scores les plus faibles. Rappelons qu'aux élections européennes de 2004 les listes du Parti Socialiste étaient arrivées en tête, et de loin, recueillant 28,9 % des suffrages exprimés, alors que l'UMP en était à 16,6 %. En 2004, l'électorat avait choisi le vote socialiste comme moyen d'affirmer son opposition au gouvernement UMP (Chirac-Raffarin). Cette fois, non seulement cela n'a pas été le cas, mais une partie de son électorat traditionnel lui-même a déserté le vote PS.

Malgré sa longue cure dans l'opposition, le Parti Socialiste n'a pas réussi à regagner durablement cet électorat populaire qu'il a écoeuré par sa politique propatronale pendant les cinq ans du gouvernement de la Gauche plurielle, de 1997 à 2002. Le Parti Socialiste n'a rien à dire aux classes populaires, et plus particulièrement aux salariés durement frappés par l'offensive de la classe capitaliste, redoublée par la crise. Et sa base petite-bourgeoise, plus importante sans doute numériquement, est aussi plus versatile. Quant aux rivalités qui déchirent la direction, peu ragoûtantes car sur la base d'une même absence de politique, elles sont autant une conséquence qu'un facteur aggravant de cette situation du PS.

Cela fait un certain temps que bien des commentateurs s'attendaient à une OPA sur ce parti. Ils attendaient Bayrou, et finalement ce fut Cohn-Bendit.

Avec 16,28 % des voix, les listes des écologistes talonnent celles du Parti Socialiste, et dans bien des endroits elles les dépassent. Les écologistes doublent donc leurs résultats par rapport aux 7,41 % des européennes de 2004, sans même évoquer la comparaison avec le 1,57 % réalisé par Voynet au premier tour de la présidentielle de 2007.

Ce serait simplifier les choses que de trouver l'explication de cette progression explosive dans la progression des préoccupations écologistes dans la population. Une partie de l'électorat du Parti Socialiste, qui recoupe sans doute celle qui, il y a peu, louchait vers François Bayrou, a marqué sa défiance vis-à-vis du Parti Socialiste en votant pour les écologistes. Ce n'est certainement pas une poussée à gauche. Ce méli-mélo composite qu'est le courant écologiste n'est pas plus à gauche que le Modem de François Bayrou, si tant est qu'on puisse trouver une unité de mesure dans ce domaine. L'un est aussi loin que l'autre des intérêts du monde du travail. La percée des écologistes, si elle se révèle autre chose qu'un feu de paille, et le recul concomitant du Modem ouvrent la possibilité de nouvelles ma-noeuvres et de nouvelles combinaisons en vue des prochaines élections, régionales notamment.

Sur la gauche du Parti Socialiste, ce sont les listes du Front de Gauche qui arrivent en premier, avec 6,05 % des voix. Ce front, dont on ne sait pas trop s'il est temporaire ou destiné à devenir une alliance durable entre le Parti Communiste et le Parti de Gauche de Jean-Luc Mélenchon, dépasse donc le NPA qui, de son côté, a obtenu 4,88 % des voix.

Malgré les envolées lyriques de L'Humanité, les résultats du Front de Gauche ne constituent pas une percée car il faut rappeler que, lors des européennes de 2004, le PCF avait obtenu 5,88 % des suffrages. Tout au plus, pourra-t-on constater, si l'alliance se révèle durable, que le sénateur ex-socialiste Mélenchon, ex-ministre au côté de Marie-George Buffet dans le gouvernement Jospin, aura réussi son OPA sur le PCF et ses militants. Le Front de Gauche ne cache pas son ambition de faire partie d'une nouvelle combinaison gouvernementale, devenant un des éléments possibles de la « recomposition politique » de la gauche de gouvernement.

Le NPA, qui espérait rééditer la performance d'Olivier Besancenot à la présidentielle et être la principale force électorale « à la gauche de la gauche », espoir qui semblait être conforté par des sondages très favorables au début de la campagne, n'aura pas transformé cet espoir en réalité. Le NPA peut invoquer, à juste raison, le fait que l'électorat populaire qu'il visait a préféré l'abstention pour exprimer sa défiance vis-à-vis des partis gouvernementaux, y compris de gauche. Le seuil de 5 % et le changement antidémocratique du mode de scrutin se conjuguent pour que le NPA n'ait pas d'élus au Parlement européen.

Pour ce qui est des listes Lutte Ouvrière, elles ont recueilli 206 119 voix, soit 1,22 % de l'électorat. C'est un résultat modeste, du même ordre que les 215 205 suffrages (0,85 %) recueillis aux législatives de 2007. Il témoigne cependant de la permanence dans l'électorat d'un courant qui vote pour des candidats qui se revendiquent du communisme révolutionnaire.

Il n'y a rien d'étonnant à ce que, au-delà des variations accidentelles en fonction du contexte politique, une telle organisation reste, en temps ordinaire et plus spécialement en ces temps de poussée vers la droite, extrêmement minoritaire sur le plan électoral. Il n'y a pas à s'en désoler, il faut le constater.

Les élections constituent un thermomètre. Les résultats électoraux sont un reflet, très approximatif et déformé, des mouvements d'opinion dans les classes populaires et, par là même, un reflet indirect de la réalité. Mais ils ne sont pas la réalité...

Cette réalité, c'est l'offensive de la bourgeoisie contre la classe ouvrière, aggravée par la crise, c'est l'intensification de la lutte de classe, menée pour le moment pratiquement à sens unique. Ce qui comptera pour l'avenir, ce ne sont pas les scores électoraux et les combinaisons fluctuantes qu'ils dégagent, mais la capacité de la classe ouvrière à modifier les rapports de forces avec la bourgeoisie par les luttes collectives. C'est au pied de ce mur-là, c'est-à-dire dans les luttes ouvrières à venir, qu'on jugera le courant communiste révolutionnaire.

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