À propos du film Home : Quand le groupe PPR investit dans l'écologie10/06/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/06/une2132.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

À propos du film Home : Quand le groupe PPR investit dans l'écologie

La diffusion par France 2, deux jours avant l'élection européenne, du film Home du photographe Yann Arthus-Bertrand a-t-elle rapporté des voix aux listes Vertes, comme cela a été dit ? En tout cas, cette opération, ses suites et tous les produits dérivés risquent de rapporter d'intéressants bénéfices aux auteurs, producteurs et sponsors, en l'occurrence le groupe PPR (Pinault Printemps Redoute).

Si le milliardaire François-Henri Pinault a décidé de financer à 83 % l'opération, ce n'est vraisemblablement pas seulement pour « donner du sens à [ses] affaires » en poursuivant la « démarche environnementale » qu'il dit mener depuis plus de dix ans. Le 5 juin, 8 millions de téléspectateurs n'ont pas seulement vu une succession de belles et touchantes images sur la planète, mais aussi une véritable opération publicitaire dont la rentabilité est garantie, ses promoteurs étant experts en la matière.

En échange d'un financement de 10 millions d'euros, soit seulement 1,14 % des 875 millions de bénéfices dégagés en 2008, PPR se paye non seulement une conscience écologique, mais un gigantesque espace publicitaire. Le groupe sponsor et ses composantes, La Redoute, Fnac, Conforama, Puma et diverses marques de luxe comme Gucci, Yves Saint-Laurent, Boucheron, etc., figurent en effet en bonne place dans les images et sur les affiches.

Mais au-delà, la projection du film dans les salles, la vente du DVD et des produits dérivés, souvent haut de gamme, rapporteront à leur tour des bénéfices dont une partie sera versée à l'ONG d'Arthus-Bertrand, Good Planet. Ainsi, ceux qui s'achèteront des escarpins Sergio Rossi en cuir écologique, talons bois et teintes végétales à 370 euros, ou un t-shirt Gucci en coton bio à 140 euros, auront le sentiment d'accomplir de surcroît une « bonne action » pour la planète ! De même, a fortiori, que le riche acheteur de la pièce unique de joaillerie fabriquée par Boucheron pour la circonstance et vendue aux enchères.

Qu'importe apparemment que la réalisation du film ait généré la production de plus de 1 500 tonnes de CO2 rien que lors de la prise de vue en hélicoptère. Qu'importent également les produits rien moins qu'écologiques vendus par la Fnac, Conforama et les centaines de poids lourds affrétés par La Redoute, puisque PPR, comme tout autre capitaliste se prétendant conscient des dangers encourus par la planète - la faute à qui ? - peut se « racheter » : il lui suffit de verser à Good Planet un montant compensatoire, évalué au moyen d'un « écocalculateur » obligeamment mis à disposition sur le site de l'association.

Quant aux « 88 000 collaborateurs », les salariés des entreprises du groupe auxquels PPR rend hommage dans ses pages de publicité, ils sauront que, grâce à leur travail, 418 millions d'euros sont cette année versés en dividendes aux actionnaires, alors même que Pinault a décidé de supprimer les emplois de 1 850 d'entre eux.

Partager