Brésil : l’eau et l’électricité menacées par le profit08/04/20152015Journal/medias/journalnumero/images/2015/04/2436.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil : l’eau et l’électricité menacées par le profit

Depuis le début de l’année, la moitié sud du Brésil est frappée par des coupures de courant à répétition. En même temps l’eau menace de manquer au robinet, et une grande ville comme Sao Paulo rationne les quartiers populaires. Cela n’est pas dû à une surconsommation irresponsable des citadins, mais à une mauvaise gestion des ressources en eau en vue des profits privés.

Les grands fleuves brésiliens des bassins de l’Amazone et du Parana charrient 13 % de l’eau douce de la planète et produisent 90 % de l’électricité du pays. Encore faut-il gérer correctement ces énormes ressources, veiller à ce que les barrages se remplissent à la saison des pluies et à ce que l’eau de consommation ne se perde pas par les fuites du réseau de distribution. Ce n’est pas le cas.

Le système de contrôle de la production et celui de distribution de l’électricité ont été privatisés dans les années 1990, les centrales hydroélectriques restant publiques. Les gestionnaires privés veillent à dégager un maximum de profits : les tarifs ont augmenté de 23 % en moyenne en février, de 60 % sur un an. Mais ils ne se préoccupent pas du niveau de l’eau dans les barrages, ce qui avait déjà entraîné en 2001-2002 une grave crise de l’électricité. Cette année il a peu plu de décembre à février dans le sud du pays, à la saison des pluies, et les barrages sont au plus bas. Il n’y a plus d’autre solution que de couper le courant en milieu d’après-midi, au moment où les systèmes de climatisation et les ventilateurs tournent à fond.

La même négligence frappe le système d’adduction d’eau. L’eau au robinet représente 6 % de la consommation, l’agriculture industrielle 72 % et l’industrie 22 %. À Sao Paulo, la distribution d’eau a été privatisée à partir de 2002, même si l’État de Sao Paulo conserve 51 % des actions. Le système Cantareira de réservoirs est notoirement dépassé et la construction d’un réseau d’appoint a été décidée, mais les travaux n’avancent pas. Cela n’a pas empêché les actionnaires de pousser à la consommation d’eau, qui leur rapporte, sans investir pour entretenir les canalisations, où 40 % de l’eau se perd. Aujourd’hui, le niveau des réservoirs est tombé à 5 % et le gouverneur impose le rationnement aux quartiers pauvres de la région métropolitaine, comme il l’avait déjà fait en 2003, lors d’une précédente pénurie. Rio, Belo Horizonte et leurs villes de banlieue sont eux aussi menacés.

Face à ces pénuries d’eau et d’électricité, le gouvernement national et les gouverneurs régionaux ont leurs solutions : culpabiliser la population, pour qu’elle restreigne momentanément sa consommation, et augmenter les tarifs. Le ministre des Mines et de l’Énergie l’a dit : « Nous avons de l’énergie. Elle existe, mais elle est chère. » Les prix vont donc encore augmenter, pour accroître les profits d’actionnaires dont l’incurie a provoqué la crise.

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