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Leur société
Téléthon : Quand la générosité de la population pallie les choix de l'État
La levée de boucliers a été quasiment unanime après les déclarations de l'homme d'affaires Pierre Bergé attaquant le côté médiatique du Téléthon, voire son succès.
Depuis 1987, l'AFM, l'Association française contre les myopathies, organise chaque année, grâce au partenariat de la télévision publique, de certains de ses animateurs et de quelques vedettes, cette émission fleuve destinée à recueillir des promesses puis des dons venant de la population.
Ainsi depuis plus de vingt ans, un milliard et demi d'euros a été versé par les téléspectateurs, qui participèrent ainsi largement à l'ouverture par l'AFM du laboratoire du Généthon à Évry, aux progrès de la recherche en génétique et à d'importantes avancées dans la guérison de maladies génétiques.
C'est, semble-t-il, ce succès populaire qui motive l'amertume de Pierre Bergé et de ses associés à la présidence de l'association Sidaction. En 2009, quand le Téléthon rassemblait près de 105 millions, Sidaction ne parvenait à en récolter que sept. Disproportion de moyens, accusent les parrains de Sidaction, mettant également en cause la différence d'« image que les deux associations donnent des malades et de la maladie ». Ils évoquent ainsi le principe de l'émission qui consiste à « ne mettre au premier rang que des enfants malades, et malheureusement très gravement malades », la qualifiant d'« exhibition populiste et indécente ».
Mais l'indécence est ailleurs. Évidemment pas chez ces enfants malades, perçus au contraire par le généticien Axel Kahn comme des « militants » de leur cause. Elle est dans la souveraine indifférence de l'État qui se réfugie derrière la générosité des millions de donateurs individuels pour se désengager financièrement de la recherche médicale, qu'il s'agisse d'ailleurs des maladies génétiques ou du sida. Le collectif Sauvons la recherche a montré en effet qu'en 2008 le financement budgétaire de la recherche civile, incluant environ 10 % d'aide aux entreprises, n'a représenté en France que 0,53 % du produit intérieur brut. Ce pourcentage, minime, a baissé d'un tiers en cinq ans ; le retard accumulé ne pourra donc être rattrapé, d'autant plus qu'une partie du budget alloué servira principalement, selon le collectif, à la « mise en place de la politique de pilotage autoritaire du gouvernement ».
Comparés aux sommes allouées à l'aide au patronat et aux banques, les quelque dix milliards de la recherche ne pèsent en fait pas lourd. Il est donc heureux que les enfants malades puissent compter sur la solidarité de millions de braves gens, mais... très malheureux que l'État s'en désintéresse.