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- Lutte ouvrière n°2120
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Editorial
Le 19 mars doit être un succès et une étape vers la grève générale
Les travailleurs de Continental à Clairoix, dans l'Oise, avaient toutes les raisons d'avoir la rage lorsque le patron a annoncé, du jour au lendemain, la fermeture de l'usine et leur licenciement. D'autant plus que, quelques mois auparavant, la direction leur avait imposé le retour aux 40 heures hebdomadaires en prétextant que cela était nécessaire pour sauver les emplois du site, alors que le projet de fermeture de l'usine devait être déjà élaboré !
Comme tant d'autres grandes entreprises qui licencient, Continental a pourtant réalisé l'année précédente des profits respectables, et même l'usine de Clairoix était encore bénéficiaire. C'est une catastrophe sociale pour toute la Picardie, dont Continental est la plus grande entreprise.
Les semaines précédentes, c'est Total qui a fait scandale en annonçant des licenciements aussi bien dans sa filiale Hutchinson que dans le trust lui-même, alors qu'il est le champion toutes catégories des profits en France.
Le procédé était tellement grossier que même un ministre s'est lâché en criant « au scandale ». Mal lui en a pris car son chef, le Premier ministre Fillon, l'a sèchement rappelé à l'ordre. « Un ministre, ça démissionne ou ça ferme sa gueule », avait dit en son temps un ministre, « socialiste » celui-là. Avec des mots plus élégants, Fillon rappelle à son jeune subordonné qu'un ministre, ça doit servir les patrons, et surtout le plus puissant d'entre eux, et pas les critiquer. Et surtout pas sur une question aussi sensible que les licenciements, que le patronat considère comme un de ses droits régaliens.
Face aux attaques qu'ils subissent, les travailleurs ne peuvent compter que sur leur propre force. Cette force est immense, à condition qu'elle soit déployée. Ce sont les travailleurs qui font marcher toute l'économie. Il est en leur pouvoir aussi de l'arrêter.
Ils ont les moyens d'imposer leurs exigences qui tournent autour de deux questions : l'emploi et les salaires. Contre le chômage, il faut interdire les licenciements et imposer la répartition du travail entre tous. Contre la baisse du pouvoir d'achat, il faut une augmentation générale des salaires et des retraites.
Après avoir tergiversé, les syndicats appellent à une journée de grève et de manifestations pour ce jeudi 19 mars. Il faut que cette journée soit un succès. Il faut que la participation aux manifestations soit nombreuse et que les grèves soient largement suivies.
Mais il est inadmissible que les directions syndicales qui ont appelé à cette journée ne disent pas la suite qu'elles comptent lui donner et n'annoncent pas clairement une stratégie de mobilisation.
Dans les tracts syndicaux revient l'expression « nouvelle étape ». Mais une étape pour aller où ? Ceux qui seront en grève le 19 mars ou ceux qui descendront dans la rue sont en droit de savoir quelle est la politique des directions syndicales et, avant tout, si elles en ont une. Car, quel que soit le succès du 19 mars, chacun sait qu'une seule journée n'inquiète le patronat que s'il a des raisons de penser qu'elle fait monter le climat social et que les grèves risquent d'être de plus en plus déterminées, de plus en plus amples et susceptibles de déboucher sur une grève générale.
En se refusant à parler d'une suite, les directions syndicales ne peuvent même pas invoquer le prétexte d'une quelconque rencontre avec Sarkozy ou des négociations avec le gouvernement. L'un comme l'autre affirment qu'ils ont déjà tout dit et que les réformes continuent.
Ce qui vient de se passer en Guadeloupe et en Martinique montre à la fois la hargne du patronat et son refus de lâcher quoi que ce soit aux travailleurs, mais aussi que, devant un mouvement d'ensemble, il a été contraint de reculer. Les millions de travailleurs de l'ensemble du pays peuvent imposer un tout autre rapport de forces que les dizaines de milliers de travailleurs de Guadeloupe et de Martinique.
Que l'on ne nous dise pas que ce qui est possible aux Antilles ne l'est pas en France ! Ici aussi, c'est par la grève générale, en 1936 ou en 1968, que les travailleurs ont pu contraindre le patronat aux reculs les plus importants.
Alors, il faut faire du 19 mars un succès et faire en sorte que les directions syndicales soient obligées de lui donner une suite, si elles ne veulent pas que les travailleurs finissent par se passer d'elles.
Arlette LAGUILLER
Éditorial des bulletins d'entreprise du 16 mars