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- Lutte ouvrière n°2364
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Leur société
La dette publique ou... Le pillage de l'État par la bourgeoisie
En 2012, François Hollande s'était fait élire en promettant de réduire les dépenses de l'État. Il disait vouloir en revenir aux règles européennes d'un maximum de 3 % pour le déficit du budget et pas plus de 60 % du PIB (produit intérieur brut) pour la dette de l'État. Au nom de quoi, le gouvernement justifie sa politique de hausse d'impôts et de réduction des moyens alloués aux services publics, dont les classes laborieuses sont les premières victimes.
Les gouvernants reconnaissent hypocritement demander des « efforts » à la population. Mais ils les présentent comme inévitables pour réduire la dette de l'État. Bien sûr, ils se gardent de dire que les nantis, et surtout le grand patronat, qui ont creusé la dette de l'État, n'en font pas les frais. Pire, ils en tirent même du profit au travers des emprunts que l'État émet du fait de cette dette.
Avec la crise actuelle du capitalisme, ce phénomène a pris des proportions colossales. L'État finançant la bourgeoisie à guichets ouverts, la dette publique a explosé. Si en 1995 elle se montait à 663 milliards d'euros, dix-huit ans plus tard, elle a triplé et frise les 2 000 milliards.
Chaque année, l'État consacre une part croissante de ses dépenses à faire face aux seuls intérêts de cette dette. C'est même devenu le poste principal du budget. Pour cela, l'État recourt à l'emprunt. L'Agence France Trésor (AFT), qui gère la dette de l'État, émet bon an mal an pour 110 milliards d'obligations. Elles servent essentiellement à rembourser les intérêts d'une dette qui croît et embellit.
Voici un exemple récent. On sait comment, en 1993, l'État a pris à son compte - celui des contribuables - l'ardoise de 20 milliards laissée par les opérations du Crédit lyonnais au profit du monde des affaires. Le gouvernement vient de rembourser par anticipation l'établissement qui avait prêté à l'État français les 4,5 milliards restant de ce sauvetage financier. Mais, pour ne pas avoir à décaisser cette somme, il s'est adressé aux « marchés » pour... emprunter cet argent à d'autres financiers. Cela ne réduira pas la dette de l'État, mais ce tour de passe-passe permet à des établissements financiers et à leurs très gros clients de faire une très bonne affaire.
Quant aux gros détenteurs de cette dette, les trois premiers sont les îles Caïmans, le Luxembourg et le Royaume-Uni, repaires de fonds dits d'investissement, où des capitalistes français et autres camouflent leurs avoirs. On trouve là tout le gratin du monde français de la finance : Axa, Allianz, MMA, CIC, BNP, CNP, Matmut, Groupama, Natexis, MAAF, Banque postale, etc. Les compagnies d'assurances détiennent 21 % de cette dette, les banques 14 %.
L'État, qui a versé des dizaines de milliards aux banques lors de la crise de 2008, s'est endetté auprès des mêmes et de leurs pareils. Et c'est à eux qu'il verse, rubis sur l'ongle, une bonne part des 110 milliards qu'il emprunte chaque année.
Il y a là un système bien huilé de pillage de l'État par la bourgeoisie. Les gouvernements l'alimentent en pressurant les classes laborieuses. Comme vient de titrer la revue économique Challenges : « Malgré une nouvelle dégradation » de la note attribuée à la France par l'agence de cotation Standard & Poor's, « la dette française reste attractive ». En tout cas, pour les nantis.