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Syrie : Les grandes puissances et la révolte populaire - Paroles verbales et balles réelles
Lundi 19 septembre, comme quasiment tous les jours depuis cinq mois, l'armée du dictateur syrien Bachar Al-Assad a tiré sur des manifestants, tuant cinq personnes. Selon l'ONU la répression aurait fait 2 600 morts depuis le début de la protestation populaire contre le régime.
Le ministre des Affaires étrangères français, Alain Juppé, a dénoncé le « silence inacceptable de l'ONU » devant ce qu'il qualifie de « crimes contre l'humanité ». Ces nobles paroles ne feront pas oublier que la France, comme toutes les autres grandes puissances, n'a jamais rien trouvé à redire à la dictature syrienne tant qu'elle semblait capable de tenir son peuple sous la botte. Bachar Al-Assad, dictateur et fils de dictateur, a été reçu à Paris et dans toutes les grandes capitales. Devant les milliers de morts assassinés par les forces de répression, le gouvernement français s'est jusque-là borné à s'associer à l'embargo décidé par l'Union européenne sur le pétrole syrien, interdisant toute importation, achat et transport.
La Syrie est un petit producteur de pétrole (environ 25 millions de tonnes par an) qui exporte presque exclusivement vers des pays de l'Union européenne. La vente de ces hydrocarbures représente un cinquième du budget de l'État.
Les États-Unis qui, eux, n'importent pas de pétrole de Syrie, avaient déjà décidé d'un tel embargo... sans effet évidemment. Mais l'embargo européen n'aura pas beaucoup plus d'effet puisqu'il autorise les compagnies pétrolières à continuer leurs importations jusqu'au 15 novembre lorsqu'elles ont des contrats en cours, soit deux mois et demi après l'entrée en vigueur de l'embargo. Les États et les pétroliers ne sont donc pas trop pressés.
En outre, si les importations européennes devront cesser le 15 novembre, rien n'est dit pour la production elle-même. Et c'est ainsi que Total, l'un des principaux exploitants en Syrie, a annoncé qu'il entendait respecter l'embargo mais qu'il continuerait sa production sur le sol syrien. Que fera-t-il du pétrole extrait après le 15 novembre ? Pour le moment rien n'est dit, mais il est évident que Total n'a pas l'intention de céder la place.
Après plus de cinq mois de mobilisation populaire et de répression sauvage, les grandes puissances ne souhaitent en fait qu'une chose pour la Syrie : le maintien d'un pouvoir fort garantissant la stabilité des affaires. Et si cela doit être encore et toujours celui de l'encombrant Bachar Al-Assad, ils s'en feront facilement une raison.