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- Lutte ouvrière n°2171
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Leur société
Perte d'emplois industriels : Pas de fatalité, seulement la rapacité du patronat
Sarkozy, en visite dans les ateliers d'Eurocopter à Marignane le jeudi 4 mars, a fait mine de déplorer la désindustrialisation de la France. Il a refait son numéro favori, celui de l'homme de bonne volonté faisant son possible face aux catastrophes. Mais il s'agit surtout de cacher que cette évolution n'est pas une fatalité économique, mais le résultat des choix du patronat dont il est le défenseur.
Qu'en est il exactement de cette désindustrialisation ? De plus de cinq millions en 1980, le nombre des travailleurs employés dans l'industrie est tombé à moins de trois millions et demi aujourd'hui. D'après un récent document de la Direction générale du Trésor et de la politique économique du ministère de l'Économie, de l'Industrie et de l'Emploi, DGTPE, daté de février 2010, 20 à 25 % des deux millions d'emplois industriels disparus correspondent au fait que les patrons ont externalisé certaines de leurs activités, le nettoyage, le gardiennage mais aussi la maintenance ou le service informatique, et qu'ils ont eu massivement recours à des dizaines de milliers d'intérimaires. Tous ces travailleurs, bien que travaillant pour l'industrie, relèvent du secteur des services. Ces emplois n'ont donc pas disparu mais, d'emplois industriels, ils sont devenus emplois de service, et pour les travailleurs concernés, cela a signifié une énorme dégradation des conditions de travail et de salaire. Car les patrons ont pu de cette manière aggraver l'exploitation et augmenter encore leur marge bénéficiaire.
Si l'on met de côté ce phénomène, la perte réelle d'emplois industriels, entre 1982 et 2007, s'élèverait à 1,5 million d'emplois. Et, toujours d'après le même document de la DGTPE, la première cause de cette destruction serait l'augmentation de la productivité : « L'impact des gains de productivité est de l'ordre de 43 000 emplois détruits par an entre 2000 et 2007, soit 65 % des destructions observées. » Tous les ouvriers de l'automobile, tous ceux de la chimie et d'autres secteurs de l'industrie pourraient témoigner de la façon dont ont été obtenus ces gains de productivité. Le patronat s'est efforcé depuis des années de faire produire autant, voire plus, avec des effectifs réduits et des rythmes de travail épuisants. Et il a fait cela en limitant au maximum les investissements nécessaires au maintien de la production.
Et toute cette richesse ainsi produite - la valeur ajoutée industrielle en volume a en effet augmenté de 1995 à 2007, passant de l'indice 100 à 125 - tirée de l'exploitation accrue des travailleurs a été perdue, gaspillée par le grand patronat qui trouve plus facile et rapide de s'enrichir en se lançant dans des opérations spéculatives.
Alors, si Sarkozy dénonce la disparition des usines en accusant pèle-mêle l'euro fort, les 35 heures ou les emplois délocalisés, c'est qu'il voudrait que les travailleurs se trompent de cible. Si les travailleurs veulent changer leur sort, c'est au pouvoir du grand patronat, seul responsable de la crise, qu'ils devront s'attaquer.