Comores : Un nouveau drame de l'immigration10/03/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/03/une2171.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Comores : Un nouveau drame de l'immigration

Le 7 mars, le naufrage d'un « kwassa-kwassa » près des côtes de Mayotte a fait neuf morts, quatre femmes et cinq nourrissons. L'embarcation de fortune, en provenance des Comores, transportait 33 passagers.

Avant l'instauration des visas par le gouvernement Balladur en 1995, les habitants des trois autres îles de l'archipel des Comores, situé dans l'océan Indien près des côtes malgaches, pouvaient se rendre librement dans l'île de Mayotte, sous administration française. Mais depuis la mise en place de cette absurde barrière, ces populations soeurs y sont devenues étrangères.

Parce que n'ayant pas ce précieux sésame qu'est le visa, des centaines de pauvres des Comores, surtout ceux de l'île d'Anjouan, la plus proche de Mayotte, bravent en permanence le danger que représente la périlleuse traversée à bord de bateaux branlants, non sans avoir auparavant déboursé des sommes importantes pour payer les passeurs.

Ces personnes fuient la misère de leur pays avec l'espoir de trouver du travail, de se faire soigner ou de faire naître un bébé dans les hôpitaux de Mayotte. Des femmes enceintes figurent d'ailleurs souvent parmi celles qui tentent la traversée.

Près de 7 500 bébés naissent chaque année à Mayotte, dont 5 000 dans l'hôpital de Mamoudzou, la capitale. Une femme accouchant à Mayotte peut en effet espérer que son enfant obtienne la nationalité française et puisse vivre à Mayotte, à La Réunion, voire venir en France métropolitaine.

Ceux qui tentent le voyage vers Mayotte en connaissent les dangers, mais ils les prennent néanmoins, pour eux-mêmes et leurs enfants, choisissant de risquer leur vie et celle de leurs proches pour espérer un mieux-être hypothétique, comme le font des centaines de milliers de migrants qui de par le monde fuient une misère intolérable. Arrivés à destination, leur sort est souvent peu enviable. Ils vivent clandestinement, dans des conditions difficiles, avec la peur d'être arrêtés et expulsés.

Chaque année, à Mayotte, plus de 15 000 prétendus clandestins sont expulsés, dont des parents de jeunes scolarisés qui ont été désignés aux autorités par des responsables de l'Éducation nationale. Il est même arrivé que des élèves l'aient été aussi, au mépris d'une circulaire de mars 2002 qui stipule que « l'inscription dans un établissement scolaire d'un élève de nationalité étrangère, quel que soit son âge, ne peut être subordonnée à la présentation d'un titre de séjour ». Concernant des parents sans papiers, Hortefeux, le ministre de l'Intérieur, est intervenu pour rappeler que « les services de l'Éducation nationale ne sont pas chargés de contrôler la situation des parents d'élèves au regard de la législation sur le droit de séjour des étrangers ». Qu'un ministre ayant pour objectif d'afficher un nombre important d'expulsions se sente ainsi obligé de réfréner l'ardeur de sous-fifres en dit long sur la situation faite aux migrants.

L'État français porte une lourde responsabilité dans les drames de l'immigration. Une double responsabilité en fait : celle d'avoir érigé une barrière meurtrière entre des populations qui durant des siècles avaient vécu ensemble, mais aussi celle de maintenir les Comores sous sa domination économique. Les autorités comoriennes n'ont par exemple aucun contrôle sur leur monnaie, dont la valeur liée à l'euro est fixée par la Banque de France. Qui plus est, la seule banque commerciale comorienne, la Banque pour l'Industrie et le Commerce, est majoritairement possédée par la BNP.

Maintenir des populations dans la misère et leur interdire la moindre lueur d'espoir, voilà tout ce dont ce système est capable.

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