Leur faire passer le goût de la brioche !04/11/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/11/une2153.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Leur faire passer le goût de la brioche !

5 362 euros : voilà ce qu'a coûté par invité, restauration et aménagement compris, le dîner offert par l'Élysée à quelques chefs d'État et têtes couronnées, réunis le 14 juillet à l'occasion du sommet de l'Union pour la Méditerranée ! Un sommet qui n'a servi à rien, si ce n'est à permettre à Sarkozy de faire de l'épate auprès de gens de son monde. Même la très officielle Cour des comptes a trouvé l'addition saumâtre. Le salaire de cinq smicards pendant un mois pour le dîner, même de gala, d'un seul individu !

Cela donne un petit aperçu de leur monde, là où l'argent n'est pas un problème. Mais un tout petit aperçu seulement car, s'il y a des organismes officiels pour surveiller un peu, et avec beaucoup de mansuétude, les dépenses des dirigeants politiques, il n'y en a pas pour les véritables riches, ceux qui possèdent les entreprises et les banques, ceux qui sont les véritables maîtres de l'économie.

Tout le monde avait été choqué à l'époque lorsque Sarkozy, fraîchement investi président de la République, avait passé des vacances de luxe sur le yacht de Bolloré. Mais c'est Bolloré qui avait invité Sarkozy, pas l'inverse ! Un homme à qui son argent donne assez de puissance sociale pour convier un président de la République.

Bolloré, personne ne vérifie ses dépenses, et aucune Cour des comptes n'a le droit de disséquer sa fortune. C'est son argent, il en fait ce qu'il veut, même s'il résulte de l'exploitation des dizaines de milliers de travailleurs de ses multiples sociétés et du pillage de la moitié de l'Afrique.

Pour ces gens de la grande bourgeoisie, même la crise actuelle de l'économie capitaliste est une occasion d'enrichissement. Cette crise est pourtant un drame pour les exploités, pour ceux qui, licenciés, se retrouvent au chômage et même pour ceux qui ont gardé leur emploi et leur salaire mais dont le pouvoir d'achat s'érode. Et c'est une catastrophe pour toute la société, car les fermetures d'usines, les compétences laissées en friche, c'est aussi de la capacité de production détruite, alors qu'il y a tant de besoins mal ou non satisfaits. C'est également l'écrasante majorité de la société qui subit les conséquences de la dégradation des services publics, de la fermeture des hôpitaux de proximité, du délabrement des transports publics de banlieue, du démantèlement des services postaux, de la diminution du nombre d'enseignants dans les écoles des quartiers populaires.

Pour les capitalistes les plus puissants, la crise c'est, au contraire, l'occasion de mettre la main sur des concurrents moins forts et de concentrer entre leurs mains encore plus de richesses et de pouvoir sur la société. C'est l'occasion surtout d'aggraver encore l'exploitation de la classe ouvrière. Directement, dans les entreprises, en se servant de la pression du chômage pour aggraver les conditions de travail et pour faire faire plus de travail par moins de travailleurs plus mal payés. Et indirectement, par l'intermédiaire de l'État. Celui-ci fonctionne comme une immense pompe à prélever de l'argent sur toutes les classes populaires, afin de le reverser sous des formes diverses à la classe capitaliste. Mais, en cette période de crise, la pompe fonctionne plus fort que jamais.

Car les milliards donnés ou prêtés par l'État aux banquiers pour qu'ils sortent encore plus riches de la crise financière qu'ils ont provoquée, il faudra les récupérer quelque part. C'est aux classes populaires que la note est présentée. Le déremboursement de nouvelles catégories de médicaments, le projet d'imposer les indemnités journalières d'accidents du travail, font déjà partie de la note.

Mais en fait partie aussi la suppression de la taxe professionnelle, qui soulève des murmures même dans les rangs de la majorité sénatoriale. Pas la suppression elle-même, car tout ce beau monde est d'accord pour faire ce joli cadeau aux patrons, petits et grands. Mais cela signifie des revenus en moins pour les municipalités, qui seront poussées à augmenter les impôts locaux. Cela a déjà commencé, mais ce n'est encore rien en comparaison de ce qui nous attend.

Le gouvernement et le patronat continueront ainsi, car c'est l'aggravation de l'exploitation qui permet aux grandes entreprises et aux banquiers de faire du profit malgré la crise.

Oui, ils continueront ainsi, jusqu'à ce que cela leur explose à la figure et que la révolte des exploités leur fasse passer le goût des repas à 5 362 euros !

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du lundi 2 novembre

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