États-Unis : Les travailleurs de Ford disent non à de nouveaux sacrifices04/11/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/11/une2153.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : Les travailleurs de Ford disent non à de nouveaux sacrifices

Ce sont près des trois quarts des 41 000 travailleurs de Ford appelés à voter qui ont rejeté les nouveaux sacrifices que l'entreprise leur réclamait et que les dirigeants du syndicat des travailleurs de l'automobile, l'UAW, voulaient leur faire accepter. En fait, les dirigeants de l'UAW ont dû reconnaître, avant même que toutes les usines aient voté, que l'accord qu'ils proposaient était rejeté.

Les responsables syndicaux ont fait voter d'abord les usines dont ils étaient le plus sûrs et à la fin celles qui avaient manifesté le plus de résistance, comme l'usine de poids lourds de Detroit qui constitue, depuis quelques années, le centre de l'opposition aux sacrifices. Malgré cela, les résultats ont été rapidement significatifs. En effet, dans les deux premières usines, les travailleurs ont effectivement voté « oui », mais bien moins massivement qu'en mars. Et bien que quelques petites usines aient également voté en faveur de l'accord, une série de grosses usines l'ont rejeté massivement, avec des majorités des trois quarts, voire de 86 à 92 % ! Avec le vote de 84 % de « non » dans la grande usine de poids lourds du Kentucky, et celui de 93 % de « non » dans celle de Detroit, les dirigeants syndicaux ont déclaré forfait.

Ce bras d'honneur à la direction, et cette claque aux dirigeants syndicaux, est une victoire morale importante pour les travailleurs, qui jusqu'ici n'avaient pu résister aux chantages de la direction et aux pressions très fortes exercées par l'appareil syndical.

Mais trop, c'est trop !

LES SACRIFICES, ÇA SUFFIT !

L'année 2009 s'avère faste pour Ford, qui vient d'annoncer un profit d'un milliard de dollars au troisième trimestre, après avoir engrangé 2,3 milliards de dollars au deuxième trimestre ! L'entreprise présentait des bilans dans le rouge depuis 2005. Et depuis des années elle prend prétexte de ses mauvais résultats pour imposer des sacrifices considérables aux travailleurs. Ford a fermé plus d'une douzaine d'usines depuis 2003 et, au cours des quatre dernières années, il a réduit son personnel de 45 % ! Il a imposé une aggravation des conditions de travail et des coupes claires dans les avantages sociaux des salariés et des retraités. Quant aux nouveaux embauchés, ils sont beaucoup moins payés et n'ont pratiquement plus d'avantages sociaux.

Ford a eu néanmoins le culot de prétendre être désavantagé par rapport à ses concurrents, General Motors et Chrysler, qui se sont placés en avril dernier sous la protection de la loi des faillites pour se débarrasser carrément de leurs obligations salariales, sociales, fiscales... et déchirer le contrat signé avec l'UAW. Du coup Ford, qui a tout de même déjà obtenu en mars dernier une révision en sa faveur du contrat censé durer jusqu'en 2011, a osé réclamer encore de nouveaux sacrifices de la part des travailleurs !

En mars dernier, Ford avait déjà rogné sur les salaires, supprimé des primes, des jours de congés, réduit le paiement des heures supplémentaires... et il avait obtenu l'accord du syndicat pour payer avec ses propres actions une partie de ce qu'il doit au fonds qui gère la couverture médicale des retraités.

Et cette fois Ford voulait encore obtenir plus de flexibilité des travailleurs, le gel des salaires des nouveaux embauchés pour six ans et l'engagement à ne pas recourir à la grève pour les salaires ou les avantages sociaux jusqu'en 2015 !

LES TRAVAILLEURS ONT DEJOUE LES MANOEUVRES DE LA DIRECTION

Ford espérait allécher les travailleurs en promettant une prime de 1 000 dollars en mars prochain si le vote était positif. Il s'engageait en outre à fournir du travail supplémentaire à certaines usines et « à créer ou sauver » ainsi 7 000 emplois, selon les calculs de l'UAW.

Mais les travailleurs n'ont plus aucune confiance dans les promesses jamais tenues de la direction et ne voulaient pas abandonner leur droit de grève, seule arme pour faire valoir leurs revendications. Des tracts s'opposant aux nouveaux sacrifices, des affiches, des pin's, et des tee-shirts ont été utilisés à Ford Rouge à Detroit, mais aussi dans bien d'autres usines, pour appeler les travailleurs à voter « non ».

Le succès de cette campagne, en opposition aux pressions des dirigeants nationaux du syndicat, a prouvé que les travailleurs savent se donner les moyens de se faire entendre, y compris d'une usine à l'autre au travers le pays. Cela ne peut que leur redonner confiance et c'est un gage important pour l'avenir.

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