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Italie : odieuse surenchère antimigrants
Le 6 novembre, la dirigeante du gouvernement italien, Giorgia Meloni, a signé un accord de « gestion des flux migratoires » avec Edi Rama, le chef du gouvernement albanais. Elle a soigneusement mis en scène leur poignée de main, car cet accord est d’abord un argument à destination de son électorat.
Pour arriver au pouvoir, Meloni, à la tête du parti néofasciste Fratelli d’Italia (Frères d’Italie, titre de l’hymne national), ne pouvait pas faire moins en matière de xénophobie que son rival de la Ligue, Salvini. Ce dernier, ministre de l’Intérieur d’un précédent gouvernement, s’était illustré avec un décret-sécurité qui prétendait interdire aux bateaux des ONG d’accoster dans les ports de la Péninsule et de naviguer dans les eaux italiennes.
Meloni avait donc surenchéri en affirmant qu’une fois élue, elle mettrait en place un blocus naval empêchant, par des moyens militaires, les embarcations de migrants de quitter les côtes nord-africaines. S’y ajoutait la promesse que les premiers points d’accueil seraient délocalisés hors du sol italien, en Tunisie par exemple, avec laquelle l’Union européenne avait signé un accord en juillet.
Le seul résultat de ces gesticulations et de cette démagogie est de faire augmenter le nombre de morts. Les obstacles multipliés sur la route des migrants et contre les organisations humanitaires qui les secourent se traduisent par l’augmentation des naufrages. Et, de l’autre côté de la Méditerranée, suivant l’exemple en « humanité » de la riche Europe, les autorités tunisiennes ont renvoyé vers le désert et une mort certaine des centaines de migrants d’Afrique noire.
Il y a déjà eu bien d’autres accords visant à déléguer à des pays pauvres, étapes sur la route des migrants, le soin de les gérer, sans trop regarder à la manière dont ladite gestion s’opère, et cela tant au niveau européen qu’à l’initiative directe des États. Ainsi, un gouvernement de centre-gauche avait conclu en 2017 un accord avec les gardes-côtes libyens, payés pour empêcher les migrants d’arriver en Italie, se faisant le complice actif et conscient de la mise en esclavage, des viols et des tortures commis dans les camps libyens.
Or le gouvernement tunisien, pour ses propres raisons politiques, a finalement annoncé qu’il rejetait l’accord avec l’UE, que Meloni présentait comme le résultat de ses efforts. Elle s’est donc tournée vers l’Albanie, à laquelle elle promet d’appuyer sa demande d’adhésion à l’Union européenne, en échange de la construction de deux centres de rétention qui seraient placés sous juridiction italienne et ouverts dès le printemps prochain.
Après une année au pouvoir, durant laquelle Meloni a été contrainte de montrer patte blanche devant les financiers de l’Europe et les grands patrons italiens, cet accord est l’équivalent d’un os à ronger jeté à l’électorat le plus réactionnaire, dans l’espoir que son parti, Fratelli d’Italia, conserve son avance sur la Ligue de Salvini. Il ne fera pas disparaître les migrants, de plus en plus nombreux à être contraints à l’exil pour tenter de se construire une vie meilleure. Mais il permet à Meloni de faire diversion, alors que la vie des classes populaires est de plus en plus difficile et que les milliards de subvention du plan de relance vont enrichir les grandes entreprises.