Kenya : les atrocités contre un peuple colonisé08/11/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/11/2884.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Kenya : les atrocités contre un peuple colonisé

Cet article est extrait de l’éditorial des bulletins d’entreprise publiés par nos camarades de Workers’ Fight (UCI) en Grande-Bretagne, daté du 1er novembre.

Pendant que des avions israéliens larguaient des bombes sur le camp de réfugiés de Jabalya à Gaza, prétendument pour « éradiquer les terroristes du Hamas », Charles et Camilla étaient en visite royale au Kenya. Une partie de plaisir ? Pas seulement, puisque Charles s’est senti obligé d’évoquer « les actes répréhensibles du passé, […] causes de la plus grande tristesse et du plus profond regret », en référence aux atrocités commises sous le règne de sa mère lors de la lutte pour l’émancipation nationale menée au Kenya par les Mau Mau, dans les années 1952-1960.

Ces méfaits ont leur prolongement dans le présent : une bonne part des meilleures terres du pays et de son agro-industrie est toujours aux mains des Britanniques. Mais, jusqu’à très récemment, les atrocités commises ont été dissimulées. Le premier président d’après l’indépendance, Jomo Kenyatta, investi par les Britanniques en 1963, a contribué à escamoter ces faits et l’histoire de la courageuse lutte anticoloniale des Kenyans, en prétendant : « La rébellion Mau Mau est une maladie qui a été éradiquée et dont on ne doit plus jamais se souvenir. »

Pourtant, les Kenyans – y compris Samwel ­Nthigai Mburia, 117 ans, homme le plus âgé du monde et ancien « terroriste » mau mau – connaissent cette histoire. Et ils sont tout à fait capables d’établir un parallèle entre le bombardement par la Royal Air Force des combattants mau mau qui se cachaient au plus profond des forêts kenyanes en 1955 et le bombardement de Gaza par les avions israéliens aujourd’hui au nom de « l’éradication du Hamas ».

Les Mau Mau, lorsqu’ils étaient arrêtés par les autorités britanniques, étaient pendus, torturés, castrés, suspendus la tête en bas et battus à mort. Lorsque leur lutte a pris fin, plus de 300 000 d’entre eux ont été envoyés dans des camps de concentration avec leurs familles, pour y être soumis au travail forcé, à la famine, à des tortures, des viols et des meurtres. Les autorités britanniques ont également regroupé les femmes et les enfants de l’ethnie kikuyue dans 800 villages fermés et surveillés, dispersés dans la campagne et entourés de fils de fer barbelés, de tranchées et de miradors.

Une vision familière ? Elle le sera pour les Palestiniens emprisonnés à Gaza ou sous étroite surveillance en Cisjordanie, et pour les milliers d’entre eux (y compris des mineurs) enfermés dans des prisons israéliennes. Une répression tous azimuts supervisée et soutenue par les États coloniaux modernes, impérialismes américain et britannique en tête.

Netanyahou utilise le même langage que ­Kenyatta, qui avait acquis ce vocabulaire auprès des autorités britanniques : les terroristes doivent être éradiqués comme de la vermine. Cette semaine au Kenya, Charles a remis à l’ancienne « vermine » Samwel Nthigai Mburia une médaille pour remplacer celle qui lui avait été décernée après avoir combattu pour la Grande-Bretagne (notamment en Palestine – note de LO) pendant la Seconde Guerre mondiale, médaille qu’il avait, comme d’autres vétérans, jetée par dégoût...

Aujourd’hui, les méfaits de l’impérialisme et de son représentant au Proche-Orient, le gouvernement israélien de Netanyahou, se poursuivent, avec l’appui du Premier ministre conservateur Rishi Sunak et la bénédiction du leader travailliste Keir Starmer. Et Charles, figure de proue pâlichonne d’une « grande puissance » en déclin, se refuse encore à présenter la moindre excuse pour les crimes du passé.

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