Inde : Modi et l’épouvantail chinois08/11/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/11/2884.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Inde : Modi et l’épouvantail chinois

L’article ci-dessous est adapté d’une correspondance d’Inde publiée dans le journal de nos camarades britanniques de l’UCI, Workers’ Fight (octobre 2023).

En 2024, le Premier ministre Modi fera face à des élections dans cinq États et à des élections générales en avril et mai. Son gouvernement s’efforce donc de trouver des boucs émissaires responsables de tous les problèmes. Après avoir ciblé les musulmans et les « immigrants illégaux », Modi tente désormais de consolider le vote nationaliste de droite et d’intimider les manifestants en s’appuyant sur le sentiment anti-Chinois propagé par l’administration Biden. Sa dernière cible est NewsClick, une entreprise de médias de gauche favorable aux partis communistes du pays. Il fait ainsi d’une pierre deux coups, ciblant la critique du gouvernement et la « menace » chinoise.

Citant un article du New York Times affirmant que NewsClick faisait partie d’un « réseau mondial de propagande chinoise » financé par l’homme d’affaires américain Neville Singham, le gouvernement Modi a lancé une campagne de propagande contre cette entreprise. La seule preuve de propagande chinoise était une vidéo publiée par le média sur la révolution de 1949 avec la conclusion que « l’histoire de la Chine continue d’inspirer les classes populaires » !

Le 3 octobre, la police a perquisitionné le bureau de NewsClick au Kerala et le domicile des employés, arrêtant le rédacteur en chef et le responsable des ressources humaines, et saisissant des ordinateurs portables et des téléphones. NewsClick est accusé, en vertu d’une loi de 1967, de complot visant à « perturber les approvisionnements et les services essentiels à la vie de la communauté en Inde ». Cela concerne la révélation qu’elle a faite de la répression militaire dans les États frontaliers du Cachemire et de l’Arunachal Pradesh, et ses critiques de la « lutte » du gouvernement contre le Covid. Des dizaines de milliers de travailleurs migrants avaient alors été forcés de marcher des villes vers leurs villages et des patients étaient morts faute de bouteilles d’oxygène. Les poursuites visent aussi la dénonciation des profits des sociétés pharmaceutiques, et la couverture favorable donnée au mouvement paysan de 2021 contre les trois lois pro-agrobusiness de Modi. Ces « actes terroristes », affirme le gouvernement, ont porté atteinte à « la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Inde ». Toutes les critiques à l’encontre du gouvernement indien sont ainsi désormais considérées comme illégales et renvoient à… la Chine !

Le conglomérat Adani, qui appartient au milliardaire du même nom, étroitement allié au gouvernement Modi, a acquis l’an dernier une participation majoritaire dans New Delhi Television, qui avait déjà critiqué le rôle du gouvernement dans l’exacerbation de la haine religieuse. Il vient aussi de faire une offre pour 51 % de Quintillion Business Media. Les journalistes de NewsClick ont récemment révélé l’implication du groupe Adani dans la corruption qui a entouré l’achat d’avions Rafale à Dassault par le ministère indien de la Défense.

Dans un contexte d’aggravation de la pauvreté, l’opposition au parti de Modi, le BJP, s’accroît. Le BJP vient de perdre les élections de l’État du Karnataka. Nul doute qu’à l’approche des élections générales, d’autres médias seront accusés de liens avec la Chine pour prouver que « l’Inde est menacée », tandis que les voyous de Modi recourront à leur spécialité barbare faite d’attaques confessionnelles et xénophobes.

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