Airbus Helicopters Marignane : un procès qui n’a pas été celui de l’insécurité13/01/20162016Journal/medias/journalarticle/images/2016/01/Eurocopter-Marignane.JPG.420x236_q85_box-0%2C60%2C640%2C420_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Airbus Helicopters Marignane : un procès qui n’a pas été celui de l’insécurité

Jeudi 7 janvier, l’entreprise Airbus Helicopters de Marignane passait en correctionnelle pour sa responsabilité dans la chute mortelle d’un ouvrier de 62 ans, fin février 2012.

Illustration - un procès qui n’a pas été celui de l’insécurité

Il était 3 heures du matin quand celui-ci est tombé alors qu’il effectuait un contrôle sur le nez d’un Super-Puma. Ils étaient deux à travailler sur l’appareil. Dans la nuit, faute de médecin pour en décider, les marins-pompiers ne purent évacuer ce travailleur qu’une heure plus tard. Il est mort une semaine après.

Il n’y avait pas à cet endroit ces sortes d’échafaudages appelés des praticables, qui ceinturent l’appareil et auraient empêché la chute.

Il fallait travailler le plus vite possible. La production était passée en 3 x 8. Les cadences s’étaient accélérées au point qu’en l’espace de dix ans la production avait doublé. Dans ce contexte, en tant que contrôleur, ce travailleur était très sollicité puisque la validation qu’il accordait était indispensable pour poursuivre le processus de production ; sollicité au point que, plusieurs fois, des chefs étaient venus le chercher en salle de pause. Cela n’a pas empêché la direction d’affirmer au procès, contre toute réalité, que les cadences ne bougent pas car, lorsqu’il y a plus de travail, elle embauche.

Lors du procès, l’avocat de l’entreprise a commencé par présenter celle-ci, en rappelant qu’elle donne du travail à 22 000 personnes dans la région, ajoutant qu’il ne disait pas cela pour influencer. Puis il s’est appuyé sur le fait qu’il n’y avait rien eu pour dénoncer ce danger, ni de la part des syndicats, ni dans les procès-verbaux du CHSCT (comité hygiène et sécurité) qui s’était pourtant réuni vingt-sept fois en un an. De fait FO, le syndicat majoritaire qui y est hégémonique, a toujours refusé de présenter à l’ordre du jour les remarques proposées par la CGT sur ces manquements à la sécurité.

Le directeur d’établissement, lui aussi présent à l’audience, a reconnu que, puisque l’accident avait eu lieu dans l’entreprise, elle en portait la responsabilité. Mais il a nié que la scène du drame ait été modifiée et nettoyée avant les visites de la police et de l’inspection du travail. D’ailleurs, depuis, il y avait eu des investissements pour la sécurité.

Cela a suffi pour que le procureur se rende à tant d’arguments. Loin de mettre en évidence les points litigieux, il s’est efforcé de leur trouver des excuses. La police comme l’inspection du travail avaient bien été prévenues hors des délais, mais n’y avait-il pas des choses plus urgentes à faire ? Aurait-il fallu laisser sans protection l’appareil, au risque d’un deuxième accident ? Quant au juge, pour sa part, il refusait un témoignage spontané.

Le jugement ne sera rendu que dans quelque temps. Mais le déroulement du procès a été émaillé de révérences à une entreprise aussi vertueuse, plutôt que d’attention aux travailleurs qui peuvent y risquer leur vie.

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