Grands stades : gros lot pour le BTP13/01/20162016Journal/medias/journalnumero/images/2016/01/2476.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Grands stades : gros lot pour le BTP

En 2010, quand le championnat d’Europe de football 2016 fut attribué à la France, une série d’« experts » racontèrent des histoires dignes de contes pour enfants : enfin, nous expliquait-on, la France allait se mettre au niveau de l’Allemagne, de la Grande-Bretagne ou de l’Espagne, avec des stades dignes de ce nom. Le tout, à peu de frais pour le contribuable.

Parmi les dix enceintes retenues pour la compétition, qui aura lieu en juin et juillet prochain, cinq ont été rénovées, comme le Stade Vélodrome à Marseille ou le stade Geoffroy-Guichard à Saint-Etienne, parfois à grands frais. Quatre autres ont été entièrement construites : le stade des Lumières à Lyon (60 000 places) a été financé par un projet privé ; le stade Pierre-Mauroy à Lille (50 000 places), Allianz Riviera à Nice (35 000) ; Matmut Atlantique à Bordeaux (42 000 places) ont été financés par des partenariats public-privé.

Même les soirs de match, ces nouvelles enceintes sont rarement pleines. Lille accueille en moyenne 30 000 spectateurs, Bordeaux 25 000 et Nice 18 000, soit des taux de remplissage parmi les plus faibles de la Ligue 1 de football. Ils ont été « vendus » comme pouvant accueillir des événements extra-sportifs : concerts, spectacles, etc. Mais leurs dimensions rendent justement ces événements assez improbables : peu d’artistes peuvent attirer 50 000 spectateurs à Lille. Quant aux activités commerciales, elles atteignent elles aussi leurs limites.

À Bordeaux, Nice et Lille, le partenariat public-privé signifie que, pendant une trentaine d’années, les municipalités verseront un loyer à un consortium privé. Le coût final atteindra plusieurs centaines de millions d’euros – quelque 400 millions dans le cas de Nice. Les clubs ne payent que des loyers modestes aux mairies, pour lesquelles ces investissements ne peuvent donc être amortis.

L’argent dépensé pour la construction n’a cependant pas été perdu pour tout le monde. Vinci, Eiffage et autres bétonneurs ont touché le pactole. À Nice, la mairie de Christian Estrosi s’est distinguée par les largesses accordées à Vinci, au point qu’une enquête est actuellement menée par le parquet national financier. Hôteliers, restaurateurs et commerces divers espèrent aussi récupérer quelques miettes du gâteau. Mais pour les collectivités locales, l’addition est salée.

Si des dépenses publiques sont utiles en la matière, ce serait pour l’éducation sportive, le sport populaire, les clubs de quartier, dont les infrastructures sont souvent délabrées ou insuffisantes. Les choix inverses ont été faits, tant par des mairies de « gauche » que de « droite ». Au bonheur des bétonneurs.

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