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Espagne : La journée du 29 mars Une grève générale réussie
Dans toute l'Espagne, la grève générale du 29 mars a été un succès. Elle a touché tous les secteurs. Mais c'est dans la grande industrie qu'elle a été le plus suivie. Les milieux gouvernementaux et patronaux ont eu beau affirmer que le mouvement avait été suivi « modérément », les faits montrent que des centaines de milliers de travailleurs ont saisi l'opportunité de cette journée pour exprimer leur refus du chômage, des bas salaires et de l'austérité.
Une réussite dans toute l'Espagne
En Galice, au nord du pays, l'ensemble des grandes entreprises étaient paralysées, les ports et les raffineries arrêtés. À l'usine PSA de Vigo, la production n'a pas démarré ce jour-là, 90 % des 3 000 ouvriers étant en grève. À Madrid, tous les secteurs étaient touchés. À Barcelone, c'est 80 % du personnel d'entreprises comme la Seat, Nissan ou Tatay qui ont arrêté le travail. À Valence, les ouvriers de Ford ont débrayé très largement et ont formé un grand cortège. À Séville, les transports, le secteur industriel, le bâtiment étaient très touchés. Dès le petit matin, des piquets de grève syndicaux contrôlaient l'accès aux zones industrielles, ce qui permettait aux travailleurs n'osant pas braver les menaces des patrons de ne pas rejoindre leurs machines ; ces patrons qui leur avaient dit : « Si tu es absent jeudi, ce n'est pas la peine de venir vendredi. » Dans les transports, l'activité s'est réduite au service minimum et l'ensemble des services publics ont marché au ralenti.
Dans toutes les villes du pays se sont déroulées des manifestations nombreuses. Les rues, les avenues ont été envahies par les grévistes, des retraités, des jeunes, des chômeurs mais aussi les travailleurs des petites entreprises dont la situation de précarité est telle qu'ils n'osaient pas faire grève mais entendaient ajouter leur voix à la protestation.
Le gouvernement Rajoy désavoué
Le Premier ministre Rajoy s'est donc vu désavoué, à peine cent jours après son accession à la tête du gouvernement. Ses porte-parole ont eu beau tenter de minimiser l'ampleur de cette journée, elle a au contraire contribué à donner le moral à de nombreux travailleurs, aux militants, à tous ceux qui veulent imposer un coup d'arrêt aux mesures du gouvernement et du patronat. Le relatif échec électoral du Parti populaire lors des élections du 25 mars pour le Parlement d'Andalousie avait été une première claque politique pour celui-ci. Le succès de la grève générale en est une seconde.
Toutefois, le gouvernement prétend maintenir le cap et a annoncé que la réforme du droit du travail serait maintenue, sans négocier avec les syndicats, sauf sur des détails. Au lendemain de la grève, la droite au pouvoir a décidé de faire voter un budget qui réduit de 27,3 milliards d'euros les dépenses publiques et augmente les impôts, afin de faire passer le déficit public de 8 à 5,3 % du PIB. Ces mesures d'économies se sont déjà appliquées aux services de la santé et de l'éducation. Rajoy et son équipe veulent rogner tout ce qui est possible sur les remboursements de soins, et aussi augmenter le gaz de 7 % et l'électricité de 5 %. Une austérité à sens unique, bien sûr, car ils ont promis en même temps une amnistie fiscale, en contrepartie d'une taxe de 10 % pour ceux qui rapatrieraient leurs capitaux réfugiés dans des paradis fiscaux.
Vers d'autres étapes ?
Les deux principales centrales syndicales CCOO (Commissions ouvrières) et UGT, qui avaient lancé cette grève générale en demandant que la réforme sur le droit du travail fasse l'objet de négociations, ont donc reçu de la part du gouvernement une fin de non-recevoir. Elles proposent d'organiser une nouvelle journée de grève dans les semaines qui viennent. La CGT (syndicat de tendance anarchiste) ainsi que d'autres syndicats minoritaires appellent aussi à la poursuite du mouvement. Tout permet de penser que l'appel à une nouvelle action sera largement suivi. En effet la multiplication des licenciements, des fermetures d'usines, des expulsions de logement, l'explosion du nombre de chômeurs en fin de droits, l'insupportable misère à laquelle sont condamnées un nombre croissant de familles font que la colère s'accumule et tend à exploser.
Les dirigeants des centrales syndicales majoritaires, CCOO et UGT, n'offrent pas d'autre perspective que la négociation d'une réforme qui, de A à Z, est faite pour rendre les licenciements plus faciles et moins coûteux pour le patronat. Mais cette réforme n'est pas négociable, elle est à rejeter. En Espagne comme en France, les travailleurs n'ont pas d'autre choix que de créer par leurs luttes un rapport de forces qui contraigne le patronat, les capitalistes et les gouvernements à leur service, à procurer aux travailleurs un emploi et un salaire décents.
Par leur ampleur, la grève du 29 mars et les manifestations ont redonné le moral à de nombreux travailleurs. Il faut maintenant aller vers de nouvelles étapes de la riposte.